Actuellement, en France, la Haute Autorité de santé (HAS) recommande quatre techniques de chirurgie bariatrique. Schématiquement elles peuvent être divisées en deux groupes : les techniques qui reposent sur la restriction, l’anneau gastrique ajustable et la sleeve gastrectomie, et celles qui induisent une malabsorption, le court-circuit gastrique en -Y et la dérivation biliopancréatique avec switch duodénal.

Techniques restrictives : réduire le volume de l’estomac

Les techniques restrictives sont dominées par la sleeve gastrectomie, qui, outre la réduction du volume gastrique, pour diminuer la quantité d’aliments ingérés, induit une diminution de la sécrétion de ghréline.

L’anneau gastrique ajustable de moins en moins utilisé

L’anneau gastrique ajustable (adjustable gastric banding [AGB]) est une technique restrictive, réversible et adaptable, qui consiste à placer un dispositif implantable autour de la partie supérieure de l’estomac, créant ainsi une petite poche gastrique d’un volume de 30 cc (fig. 1). La mise en place de l’anneau s’effectue par voie laparoscopique et en ambulatoire. Il est positionné en rétro-­gastrique puis verrouillé autour d’une sonde de calibration intragastrique. Un cathéter relie l’anneau à un boîtier, positionné dans une logette sous-cutanée et ponctionné pour y injecter de l’eau pour préparation injectable afin de moduler l’importance de la restriction. Le bon positionnement de l’anneau, ainsi que les dysfonctionnements précoces ou tardifs, peuvent être contrôlés par un transit œso-gastro-duodénal.
Les complications postopératoires surviennent dans 4 % des cas. Les complications précoces, bien que très rares, sont des perforations gastriques ou œsophagiennes. Les complications plus tardives sont : le glissement de l’anneau, responsable de la dilatation de la poche gastrique, l’érosion et la migration intragastrique, des problèmes de connexion et de fonctionnement du boîtier. Cette technique est de moins en moins utilisée car moins efficace (en moyenne perte de 15 % du poids total) que les autres interventions bariatriques.

Sleeve gastrectomie : méthode majoritaire

La sleeve gastrectomie (SG), ou gastrectomie longitudinale calibrée, a été décrite initialement comme la première étape de la diversion biliopancréatique avec switch duodénal chez les patients souffrant d’obésité extrême (IMC > 50 kg/m²). Mais, compte tenu de son efficacité et de sa sécurité, elle est devenue une intervention à part entière. Actuellement, c’est la technique la plus couramment pratiquée en France et dans le monde. Elle est réalisée par voie laparoscopique, parfois en ambulatoire chez certains patients sélectionnés. Il s’agit d’une gastrectomie avec résection des deux tiers de l’estomac par agrafage/section, guidée par un tube de calibration positionné dans l’estomac restant (fig. 2). La sleeve gastrectomie a un rôle restrictif en diminuant significativement la capacité d’accueil du bol alimentaire. Elle joue également un rôle dans la modification de la sécrétion de la ghréline (une hormone orexigène secrétée dans l’estomac).1 Après l’intervention, la concentration plasmatique de la ghréline diminue, favorisant la satiété.
Actuellement, la mortalité (0,15-0,2 %) et la morbidité globale (4 %) de la sleeve gastrectomie sont faibles et équivalentes à celles d’une appendicectomie. La principale complication postopératoire est la fistule sur la partie haute de la ligne d’agrafage gastrique (1 à 2 %), dont le traitement, long et difficile, nécessite une prise en charge multimodale radiologique (fistulodrainage) et endoscopique (endoprothèses, drains en double queue de cochon). Si la fistule évolue vers la chronicité, le traitement définitif est chirurgical, nécessitant une gastrectomie totale ou une fistulo-jéjunostomie. À long terme, en supprimant les facteurs anatomiques de continence cardiale, la sleeve gastrectomie pourrait favoriser l’apparition ou l’aggravation d’un reflux gastro-œsophagien (RGO), voire d’un endo-brachy-œsophage. L’attitude est de contre-indiquer la sleeve gastrectomie en cas de RGO authentifié par la pH-métrie. Les recommandations actuelles exigent un suivi postopératoire endoscopique régulier et à long terme. À moyen et long terme la SG permet d’obtenir une perte pondérale conséquente (20-25 % du poids total).

Techniques comprenant une composante malabsorptive

Les techniques qui induisent une malabsorption associent une dérivation digestive à la restriction gastrique.

Court-circuit gastrique en Y, montage à double action

Le court-circuit gastrique en Y (Roux-en-Y gastric bypass [RYGB]) est une technique permettant de réaliser un montage à double action : restrictive et malabsorptive. Dans un premier temps une poche gastrique de petite taille est réalisée, par un agrafage de l’estomac. La confection de cette poche confère au montage un effet restrictif, en diminuant le volume des aliments ingérés. Lors du deuxième temps, un montage en Y est confectionné, qui lui confère un effet malabsorptif, comprenant une anse exclue, dite « biliopancréatique », et une anse dite « alimentaire » par laquelle transitent les lipides et les protides alimentaires sans avoir été ni digérés ni absorbés (fig. 3). Les glucides simples y sont néanmoins absorbés et les glucides complexes en partie digérés par l’anse alimentaire. La digestion et l’absorption débutent véritablement dans l’anse dite « commune » lorsque les sécrétions biliopancréatiques rencontrent le bol alimentaire.
Cette chirurgie est réalisée par voie laparoscopique et nécessite une courte hospitalisation ; la reprise alimentaire peut s’effectuer rapidement. La désunion d’une des sutures est la principale complication chirurgicale postopératoire (1-2 %), imposant souvent une réintervention et susceptible de prolonger l’hospitalisation. Des complications tardives peuvent également survenir après court-circuit gastrique : notamment des ulcères et des sténoses anastomotiques, des occlusions sur bride ou par hernie interne et des carences nutritionnelles. Enfin, la lithogenèse biliaire est favorisée par l’amaigrissement rapide. En prévention, la prescription d’acide ursodésoxycholique durant la période postopératoire (6 mois) est devenue la règle.2 Cette technique permet une perte de poids rapide et importante, de l’ordre de 30 % du poids initial.3 Concernant les conséquences métaboliques, plusieurs études bien menées ont montré une efficacité très importante du RYGB, supérieure à celle du traitement médicamenteux, sur le contrôle glycémique et la diminution de l’hémoglobine glyquée à long terme chez les patients diabétiques de type 2.4,5

Dérivation biliopancréatique avec switch duodénal : des indications limitées

La dérivation biliopancréatique avec switch duodénal (biliopancreatic diversion with duodenal switch [BPD-DS]) est actuellement peu utilisée. Cette intervention comprend, d’une part, une sleeve gastrectomie qui permet une restriction gastrique, et d’autre part une dérivation en Y des sécrétions biliopancréatiques qui lui confère un effet malabsorptif marqué (fig. 4). Ce montage limite de manière très importante la digestion et l’absorption des lipides qui ne peut se faire que dans l’anse commune de 100 cm. Il permet d’obtenir une perte de poids très importante (40 à 50 % de poids total).4 Néanmoins, elle entraîne une altération de la qualité de vie liée à des troubles diges­tifs majeurs : diarrhée par malabsorption, stéatorrhée, et des carences nutritionnelles importantes qui justifient une surveillance et une supplémentation vitaminique et en oligo-éléments strictes.6 Ses indications sont de fait très limitées et concernent essentiellement des patients en obésité extrême (IMC > 50 kg/m²).

D’autres interventions en cours d’évaluation

Des études cherchent actuellement à améliorer les résul­tats et la tolérance de certaines techniques ou à les comparer au court-circuit gastrique en Y.

Court-circuit gastrique en oméga : quelle longueur pour l’anse biliopancréatique ?

Le court-circuit gastrique en oméga (one anastomosis gastric bypass [OAGB]), décrit en 2001, ne comporte qu’une anastomose, associée à la confection d’une poche gastrique longue (11 à 14 cm) et étroite (4 cm). Dans la description initiale, l’anastomose gastrojéjunale est confectionnée à 200 cm de l’angle duodénojéjunal, diminuant ainsi d’une manière importante la digestion et l’absorption. Les complications postopératoires précoces sont rares mais cette intervention peut entraîner l’apparition à distance d’un RGO biliaire et, par conséquent, s’associer à un risque théorique de métaplasie voire de dysplasie du bas œsophage. De même, elle peut favoriser la diarrhée malabsorptive, la stéatorrhée, et d’importantes carences nutritionnelles.
L’essai randomisé multicentrique français YOMEGA, publié en 2019, a montré une non-infériorité du court-­circuit gastrique en oméga sur la perte de poids à 2 ans par rapport au court-circuit gastrique en Y. En revanche, le court-circuit gastrique en oméga expose à davantage de complications nutritionnelles (carences) et fonctionnelles (diarrhée, stéatorrhée) suggérant un effet malabsorptif important avec une anse biliopancréatique de 200 cm. À la suite des résultats de cette étude, la HAS a recommandé de ne plus réaliser de court-circuit gastrique en oméga avec une longueur d’anse biliaire de 200 cm et plus, et a suggéré de l’évaluer avec la longueur d’anse biliopancréatique de 150 cm.7 Les résultats d’un nouvel essai randomisé (YOMEGA-2) évaluant la sécurité et l’efficacité d’un OAGB avec une longueur d’anse biliopancréatique de 150 cm sont donc attendus.

Description récente du court-circuit duodéno-iléal avec gastrectomie longitudinale

Le court-circuit duodéno-iléal avec gastrectomie longitudinale (single anastomosis duodeno-ileal bypass with sleeve gastrectomy  [SADI-S]), récemment décrit, associe une sleeve gastrectomie à une dérivation duodéno-iléale ne comportant qu’une anastomose. En effet, il s’agit d’une dérivation biliopancréatique avec switch duodénal simplifié. Le montage comporte une anse commune de 250 à 300 cm et une anse biliopancréatique de 300 à 350 cm (non mesurée en pratique). Une section duodénale est effectuée à quelques centimètres du pylore. La conservation du pylore permet de réduire le risque de dumping syndrome lié au passage trop rapide d’aliments dans l’intestin grêle. Cette procédure s’adresse aux patients dont l’IMC est très élevé (≥ 50 kg/m²) ou constitue une alternative au court-circuit gastrique en Y lors d’une chirurgie de révision après échec d’une sleeve gastrectomie, avec des résultats satisfaisants tant sur l’efficacité que la sécurité. Le court-circuit duodéno-iléal avec gastrectomie longi­tudinale serait équivalent à la dérivation biliopancré­atique avec switch duodénal sur l’effet métabolique et la perte de poids à 5 ans et expose à moins de complications chirurgicales. Selon des études observationnelles, avec de nombreux patients perdus de vue, les effets à long terme (5 ans) comprennent une rémission du diabète de type 2 dans 77 % des cas, une baisse moyenne de l’IMC de 17,5 kg/m² et une résolution de l’hypertension artérielle dans 59 % des cas, pour une mortalité faible, voisine de 0,5 %. L’essai randomisé multicentrique français SADISLEEVE est en cours8 ; il vise à démontrer la supériorité du SADI-S sur le RYGB à 2 ans, en termes de perte d’excès de poids, de statut nutritionnel et métabolique, et de complications postopératoires.

Bipartition du transit avec gastrectomie : des suites plus simples ?

La bipartition du transit avec gastrectomie longitudinale (transit bipartition with sleeve gastrectomy [TB-SG]), décrite en 2012 comme une alternative à la dérivation biliopancréatique avec switch duodénal, reprend le principe de restriction de la sleeve gastrectomie et celui du court-circuit en Y avec, cependant, l’absence d’exclusion totale d’un segment intestinal, permettant à environ un tiers des aliments d’être digérés normalement (dans l’anse biliaire). Ainsi après la réalisation d’une sleeve gastrectomie, l’iléon est sectionné à 250 cm de la valve iléo-cæcale. L’extrémité distale de l’iléon sectionné est anastomosée à l’antre gastrique. Une anastomose au pied de l’anse est réalisée à 150 cm de la valvule iléo-cæcale avec l’extrémité proximale de l’iléon sectionné. De ce fait, la malabsorption serait bien moindre qu’après une BPD-DS et le taux de carences nutritionnelles serait moins important, selon les premières études à court terme. De plus, cette intervention évite la complexité d’une dissection et d’une anastomose duodénale, ce qui réduit le risque de complications postopératoires. D’après plusieurs études à court terme, la bipartition du transit avec gastrectomie longitudinale apparaît peu morbide, et efficace sur les comorbidités du sujet obèse, avec notamment une meilleure perte d’excès de poids et un meilleur contrôle du diabète.9 Un essai randomisé multicentrique français (BIPASS) débute actuellement, dont l’objectif principal est d’analyser la sécurité et l’efficacité à deux ans de la TB-SG, comparée au RYGB.

Une morbidité de 4 a 6 %

Avec une perte pondérale de 20 à 30 % à long terme, la chirurgie bariatrique est actuellement le traitement de référence de l’obésité morbide. Parmi les différentes techniques de chirurgie de l’obésité, la sleeve gastrectomie et le court-circuit gastrique en Y sont de loin les plus répandues. La morbidité toutes causes confondues varie entre 4 et 6 % et la mortalité reste faible (0,15 à 0,2 %). 
Références
1. Dimitriadis E, Daskalakis M, Kampa M, Peppe A, Papadakis JA, Melissas J. Alterations in gut hormones after laparoscopic sleeve gastrectomy: a prospective clinical and laboratory investigational study. Ann Surg 2013;257:647‑54.
2. Magouliotis DE, Tasiopoulou VS, Svokos AA, Svokos KA, Chatedaki C, Sioka E, et al. Ursodeoxycholic acid in the prevention of gallstone formation after bariatric surgery: an updated systematic review and meta-analysis. Obes Surg 2017;27:3021‑30.
3. Thereaux J, Corigliano N, Poitou C, Oppert JM, Czernichow S, Bouillot JL. Comparison of results after one year between sleeve gastrectomy and gastric bypass in patients with BMI ≥ 50 kg/m2. Surg Obes Relat Dis 2015;11:785‑90.
4. Mingrone G, Panunzi S, De Gaetano A, Guidone C, Iaconelli A, Capristo E, et al. Metabolic surgery versus conventional medical therapy in patients with type 2 diabetes: 10-year follow-up of an open-label, single-centre, randomised controlled trial. Lancet 2021;397:293‑304.
5. Schauer PR, Bhatt DL, Kirwan JP, Wolski K, Aminian A, Brethauer SA, et al. Bariatric Surgery versus intensive medical therapy for diabetes - 5-years outcomes. N Engl J Med 2017;376:641‑51.
6. Nuzzo A, Czernichow S, Hertig A, Ledoux S, Poghosyan T, Quilliot D, et al. Prevention and treatment of nutritional complications after bariatric surgery. Lancet Gastroenterol Hepatol 2021;6:238-51.
7. Robert M, Espalieu P, Pelascini E, Caiazzo R, Sterkers A, Khamphommala L, et al. Efficacy and safety of one anastomosis gastric bypass versus Roux-en-Y gastric bypass for obesity (YOMEGA): a multicentre, randomised, open-label, non-inferiority trial. Lancet 2019;393:1299‑309.
8. Robert M, Poghosyan T, Delaunay D, Pelascini E, Iceta S, Sterkers A, et al. Prospective multicentre randomised trial comparing the efficacy and safety of single-anastomosis duodeno-ileal bypass with sleeve gastrectomy (SADI-S) versus Roux-en-Y gastric bypass (RYGB): SADISLEEVE study protocol. BMJ Open 2020;10:e037576.
9. Topart P, Becouarn G, Finel JB. Comparison of 2-years results of Roux-en-Y gastric bypass and transit bipartition with sleeve gastrectomy for superobesity. Obes Surg 2020;30:3402‑7.

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Résumé

La chirurgie bariatrique s’est largement développée au cours des vingt dernières années et est devenue le traitement de référence de l’obésité morbide. Les interventions peuvent être de nature restrictive seule ou associer une composante malabsorptive. La gastrectomie longitudinale (sleeve gastrectomie, SG), qui consiste à enlever les deux tiers de l’estomac, est une intervention restrictive et est actuellement la plus réalisée. Le court-circuit gastrique Roux-en-Y (RYGB) reste toutefois la technique de référence, avec une composante restrictive et malabsorptive, agissant tant sur la perte pondérale que sur les complications métaboliques de l’obésité (diabète de type 2, syndrome métabolique, etc.). D’autres interventions sont en cours d’évaluation et pourraient bientôt enrichir l’offre thérapeutique.