Arnaud, 37 ans, militaire sportif et asymptomatique, consulte avec les radiographies prescrites pour une expertise médicale initiale au parachutisme. L’aile iliaque gauche est le siège d’une lacune osseuse assez importante de découverte fortuite (fig. 1).
Un complément d’imagerie par TDM (fig. 2) confirme l’existence d’une lésion soufflante mixte (graisse et os) non vascularisée à caractère très probablement bénin, évoquant soit un kyste osseux solitaire vieilli, soit une dysplasie fibreuse, de localisation tout à fait singulière.

Discussion

Le kyste osseux solitaire ou essentiel est une cavité kystique bénigne à contenu liquidien située le plus souvent en position centrale dans la métaphyse osseuse en période de croissance. Il représente 3 % des tumeurs osseuses bénignes en pédiatrie. Sites de prédilection : humérus proximal et fémur proximal. La fracture est pratiquement la seule complication ; elle révèle souvent le kyste (volontiers avant l’âge de 20 ans). La lésion peut migrer progressivement en position diaphysaire sous l’effet de la croissance osseuse chez l’enfant et régresser, voire guérir spontanément. La radiographie standard suffit le plus souvent à poser le diagnostic. Principal diagnostic différentiel : le kyste osseux anévrismal, bombé, excentré avec envahissement des parties molles.
Vu son caractère bénin et son potentiel de guérison spontanée, le traitement ne doit en aucun cas être trop invasif. Si le kyste n’a pas tendance à guérir après la fracture, un geste mini-invasif par injection percutanée (corticoïdes, moelle osseuse ou matrice osseuse déminéralisée), voire une ostéosynthèse chirurgicale peuvent être envisagés. En cas de kyste peu fragilisant, la simple surveillance est justifiée.
La dysplasie fibreuse des os est également une affection bénigne, congénitale mais non héréditaire, où l’os normal est remplacé par un tissu pseudo-fibreux renfermant une ostéogenèse immature. Comme le kyste osseux solitaire, elle est fréquemment asymptomatique. Les lésions osseuses, uniques ou multiples, peuvent être responsables de douleurs, de complications fracturaires (fragilisation des corticales), voire entraîner par hypertrophie une compression de structures neurologiques de voisinage. Elles atteignent volontiers les côtes (45 % de tous les sites), le col fémoral et l’extrémité céphalique (maxillaire, voûte du crâne et mandibule).
L’imagerie (zones transparentes ovalaires ou allongées de plusieurs centimètres, diaphysaires ou métaphyso-diaphysaires) et l’histologie, quand une biopsie est nécessaire, font le diagnostic.
Des associations sont possibles avec des anomalies cutanées et endocrines, sous-tendues par le même défaut moléculaire : une mutation activatrice du gène GNAS, touchant les cellules somatiques, donc non transmissible.
L’approche thérapeutique conventionnelle est essentiellement symptomatique (antalgiques) et orthopédique (prévention et prise en charge des complications, notamment des fractures). Un bisphosphonate de seconde génération, le pamidronate, serait efficace contre les douleurs et associé à une reminéralisation progressive des zones ostéolytiques chez environ 50 % des sujets traités. L’ostéosarcome de bas grade centromédullaire, principal diagnostic différentiel, justifie une surveillance.
Chez ce patient, un contrôle radio-clinique simple annuel a été préconisé après avis spécialisé orthopédique.
Pour en savoir plus
De Pinieux G, Bouvier A, Brouchet A, Rosset P. Stratégie diagnostique, anatomie pathologique et classification des tumeurs osseuses primitives. EMC (Elsevier SAS, Paris). Appareil locomoteur 2012;7:1-15 [Article 14-680].

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