Après un début de carrière de chimiste, Louis Pasteur, alors doyen de l’université de Lille, se concentre sur une des principales applications industrielles de la biologie : la fermentation. Cela le conduit à la microbiologie et à inventer la « pasteurisation ». Puis, entré à l’Académie de médecine en 1873 en qualité d’associé libre, ses contributions ont été de deux ordres : démonstration du rôle des microbes dans l’origine des infections et prévention par la mise au point de vaccins.
Le bicentenaire de la naissance de Louis Pasteur (né le 27 décembre 1822 et mort le 28 septembre 1895) vient d’être célébré. Si ses découvertes semblent faire partie de l’histoire, la récente pandémie de Covid-19 montre combien les difficultés qu’il a rencontrées, du cristal à l’hôpital, et pour beaucoup surmontées, restent encore aujourd’hui d’actualité. Au-delà, ce qui demeure fascinant est son parcours qui, d’une question à l’autre, a placé la microbiologie au cœur des préoccupations de la science fondamentale et d’applications agroalimentaires et médicales. Les éléments principaux de sa démarche sont ici relatés, laissant de côté d’autres travaux, tels ceux concernant la génération spontanée et les vers à soie.
Pasteur chimiste
Il est intéressant de rappeler la première expérience réalisée par Pasteur, alors élève à l’École normale supérieure (fig. 1 ). Il s’agissait de contrôler une question de cours : comme ses professeurs exposaient la difficulté d’obtenir du phosphore naturel et que l’expérience était continuellement repoussée car la manipulation était compliquée, Pasteur se fit remarquer en tentant une première victoire scientifique. Après avoir acheté des os chez un boucher et les avoir réduits en cendres, il leur fit subir toute une série de transformations, pour finir par condenser les vapeurs de phosphore. Cette expérience a précédé les découvertes fondamentales qu’il fit ensuite dans le laboratoire de Jérôme Balard (1802-1876) où il obtint un poste d’agrégé préparateur au décours de ses années d’études.
Une nouvelle science, la stéréochimie
Ses premières recherches chez cet inventeur du brome ont été inspirées par plusieurs séries de théories concernant la chimie de l’époque. La plupart des chimistes considéraient que deux corps de même composition chimique devaient avoir les mêmes propriétés physiques. Jean-Baptiste Biot (1774-1862), qui a longtemps parrainé Pasteur, avait en particulier utilisé la capacité de déviation lumineuse pour caractériser les espèces moléculaires. Il utilisait pour cela un polarimètre capable de mesurer de telles propriétés optiques. Pasteur, qui souhaitait faire appel aux deux disciplines – physique et chimie – se confronta ainsi à l’étude des cristaux pour caractériser les substances organiques. Or, avec les procédés alors en usage, peu de produits appropriés étaient disponibles pour de telles recherches. On recourait volontiers à l’acide tartrique qui cristallise aisément et dont on distingue deux formes : la première est le tartre ordinaire – connu depuis l’Antiquité – que l’on trouve dans les tonneaux de vin, en dépôt le long des cercles de bois, que la pharmacopée utilise comme vomitif et dont l’industrie du vêtement se sert pour le mordançage* ; la seconde est le paratartre, découvert fortuitement dans les cuves d’un industriel alsacien. En comparant les deux formes, Eilhard Mitscherlich (1794-1863), un des plus grands chimistes de l’époque, s’aperçut que tartre et paratartre avaient le même poids moléculaire, la même composition, les mêmes propriétés chimiques mais des propriétés optiques différentes : le tartre faisait tourner la direction de la polarisation de la lumière et le paratartre n’avait aucun effet. Eilhard Mitscherlich considérait qu’il s’agissait là d’une énigme majeure : comment deux substances de même qualité chimique pouvaient-elles avoir des propriétés physiques différentes ?
On doit à Pasteur la résolution de cette énigme : séparant un à un les cristaux à la pince, il put montrer que si le tartre avait des facettes asymétriques, l’une des faces était plus allongée que l’autre, géométrie qui expliquait ses capacités rotatoires, les cristaux de paratartre étaient de deux sortes ; les uns ayant des facettes inclinées à droite, les autres à gauche, le mélange ne déviait plus la lumière. Les espèces moléculaires pouvaient ainsi s’exprimer sous deux formes, dextrogyre et lévogyre (fig. 2 ). En montrant qu’une forme gauche n’a pas la même propriété physique que la droite, Pasteur avait ouvert la voie à une nouvelle science : la stéréochimie. Il montrait pour la première fois que l’arrangement des atomes d’une molécule s’étudiait dans l’espace. Cette découverte allait permettre également de faire avancer considérablement la biologie en montrant que la fonction des molécules dépend de leur isomérie. Il allait d’ailleurs découvrir lui-même une de ses premières applications en physiologie en indiquant que la saveur des aliments, notamment du sucre, dépend de l’asymétrie moléculaire. Une molécule biologique est donc active selon sa forme dans l’espace. Tout effet moléculaire dépend de la liaison d’un ligand avec son récepteur et celle-ci dépend de l’isomérie.
On doit à Pasteur la résolution de cette énigme : séparant un à un les cristaux à la pince, il put montrer que si le tartre avait des facettes asymétriques, l’une des faces était plus allongée que l’autre, géométrie qui expliquait ses capacités rotatoires, les cristaux de paratartre étaient de deux sortes ; les uns ayant des facettes inclinées à droite, les autres à gauche, le mélange ne déviait plus la lumière. Les espèces moléculaires pouvaient ainsi s’exprimer sous deux formes, dextrogyre et lévogyre (
La vie a besoin de dissymétrie
En 1849, Pasteur fut nommé à la faculté de Strasbourg comme professeur suppléant en chimie. Afin d’effectuer d’autres études que celles du tartre et du paratartre, il se consacra à caractériser les facettes asymétriques de nombreux échantillons chimiques. Or, en examinant une par une, méticuleusement, les différentes espèces moléculaires à sa disposition, il nota un étrange résultat : l’asymétrie a ses limites ; elle s’arrête au règne du vivant ; tous les corps qui dévient la lumière proviennent de molécules humaines, des plantes ou des animaux. Ainsi les gommes, les huiles essentielles, l’albumine, la gélatine, la fibrine, la cellulose, etc. ont toutes des activités rotatoires. À l’inverse, les corps chimiques qui ne modifient pas le spectre lumineux sont tous d’origine minérale : le gypse, la pyrite, le grenat, le calcaire, etc. sont composés de molécules à axe de symétrie. Cette découverte est à proprement parler fondamentale.
Pasteur n’hésita pas à en déduire que les molécules de la vie sont asymétriques. Plus encore, par une prise de position autant métaphysique que scientifique, il affirma que la vie avait besoin de dissymétrie. Cette découverte fut une des premières à démontrer, par la chimie et la physique, une des principales propriétés du vivant : on établira par la suite que les atomes du vivant possèdent effectivement cette dissymétrie. Cette observation n’est pas sans poser de nombreuses interrogations, qu’elles soient scientifiques, philosophiques ou même religieuses, sur l’origine de la vie et l’importance de l’asymétrie moléculaire pour la création et le renouvellement du vivant.
Pasteur n’hésita pas à en déduire que les molécules de la vie sont asymétriques. Plus encore, par une prise de position autant métaphysique que scientifique, il affirma que la vie avait besoin de dissymétrie. Cette découverte fut une des premières à démontrer, par la chimie et la physique, une des principales propriétés du vivant : on établira par la suite que les atomes du vivant possèdent effectivement cette dissymétrie. Cette observation n’est pas sans poser de nombreuses interrogations, qu’elles soient scientifiques, philosophiques ou même religieuses, sur l’origine de la vie et l’importance de l’asymétrie moléculaire pour la création et le renouvellement du vivant.
Pasteur microbiologiste
Les découvertes de Pasteur, remarquées par ses pairs et le gouvernement, lui ont permis une ascension professionnelle et d’être nommé doyen de la nouvelle université de Lille en 1854.
Démonstration des processus de fermentation
Le choix de Pasteur ne devait rien au hasard. Il avait des sciences appliquées une définition révolutionnaire : « Il n’existe pas une catégorie de science à laquelle on donne le nom de sciences appliquées. Il y a la science et les applications de la science liées entre elles comme le fruit à l’arbre qui l’a porté. » Il se concentra assez rapidement sur une des principales applications industrielles de la biologie : la fermentation. Au sein d’une région largement dédiée à la distillerie betteravière, il était judicieux de parler de la production d’alcool. Or de nombreux fabricants avaient des problèmes de production : l’alcool était de mauvaise qualité, il avait un goût acide, des vapeurs nauséabondes s’échappaient des cuves de fermentation. Un industriel dont le fils suivait les cours de Pasteur à la faculté vint le trouver pour lui demander des conseils. Pasteur trouva naturel d’aider ces fabricants en difficulté et s’enthousiasma pour leur cause. Il s’intéressa ainsi à la fermentation, s’aidant de la polarimétrie, et surtout introduisant pour la première fois un microscope dans une fabrique industrielle. Mais que savait-on alors de la fermentation ? Antoine Laurent Lavoisier (1743-1794), décapité pendant la Terreur après un réquisitoire qui disait que « la République n’a pas besoin de savant », avait affirmé, négligeant la levure, que si l’on mettait le sucre sur le plateau d’une balance, il était équilibré après fermentation par la somme du poids de l’acide carbonique dégagé et de l’alcool formé. En bref, pour lui, le sucre se transformait en poids égal en deux corps, et deux seulement. Si Lavoisier avait vu juste, ses conclusions n’étaient pas satisfaisantes ; il négligeait le rôle de la levure. En fait, les hypothèses de Lavoisier, que personne n’avait osé contredire, n’avaient été admises qu’après une série d’erreurs considérables, que d’autres savants, tels Joseph Louis Gay-Lussac (1778-1850) et Louis Jacques Thénard (1777-1857), avaient reprises en n’hésitant pas à modifier les résultats pour leur permettre de cadrer avec la simplicité plus apparente que réelle de la théorie. Certes, des expériences inexactes et des chiffres faussés ne remettaient pas l’idée en cause. Mais Pasteur avait remarqué que cet état de la question passait obstinément sous silence l’action du ferment. Or Lavoisier avait bien été obligé d’ajouter de la levure pour faire fermenter.
D’autres théories, notamment celles de Justus von Liebig (1803-1873), tenaient compte du ferment mais c’était pour affirmer qu’il se détruisait lors de la réaction. Si Lavoisier assimilait la fermentation à l’algèbre, Liebig reconnaissait l’importance de la levure mais pour insister sur le fait qu’elle se détruisait lors de la réaction. Ainsi la levure n’était indispensable que parce qu’elle disparaissait. Cette théorie allemande, qui était alors victorieuse sur le terrain de la science, ne faisait intervenir le ferment que pour considérer sa décomposition.
Outre la théorie de Lavoisier qui prônait la chimie du pondéral, et celle de Liebig, la chimie de l’échange, il en existait une autre qui tenait compte de la levure en niant sa transformation : celle du suédois Jöns Jacob Berzelius (1779-1848), qui proposait que la levure ait un rôle de catalyseur, une simple fonction d’allumage.
Pasteur contra rapidement toutes ces affirmations. S’aidant du microscope et du polarimètre, il démontra que la nature de la levure, repérable par sa taille, sa forme, sa composition ou encore la vitesse de sa multiplication, détermine la spécificité de la réaction et des produits formés. En bref, la fermentation est un acte biologique dû à la fonction et la vie des micro-organismes. Ses travaux ont ainsi permis non seulement de décrire en 1854 le processus de fermentation alcoolique mais aussi celui de la fermentation lactique qui vient la troubler et explique ainsi les fermentations défectueuses.
D’autres théories, notamment celles de Justus von Liebig (1803-1873), tenaient compte du ferment mais c’était pour affirmer qu’il se détruisait lors de la réaction. Si Lavoisier assimilait la fermentation à l’algèbre, Liebig reconnaissait l’importance de la levure mais pour insister sur le fait qu’elle se détruisait lors de la réaction. Ainsi la levure n’était indispensable que parce qu’elle disparaissait. Cette théorie allemande, qui était alors victorieuse sur le terrain de la science, ne faisait intervenir le ferment que pour considérer sa décomposition.
Outre la théorie de Lavoisier qui prônait la chimie du pondéral, et celle de Liebig, la chimie de l’échange, il en existait une autre qui tenait compte de la levure en niant sa transformation : celle du suédois Jöns Jacob Berzelius (1779-1848), qui proposait que la levure ait un rôle de catalyseur, une simple fonction d’allumage.
Pasteur contra rapidement toutes ces affirmations. S’aidant du microscope et du polarimètre, il démontra que la nature de la levure, repérable par sa taille, sa forme, sa composition ou encore la vitesse de sa multiplication, détermine la spécificité de la réaction et des produits formés. En bref, la fermentation est un acte biologique dû à la fonction et la vie des micro-organismes. Ses travaux ont ainsi permis non seulement de décrire en 1854 le processus de fermentation alcoolique mais aussi celui de la fermentation lactique qui vient la troubler et explique ainsi les fermentations défectueuses.
Création des bouillons de culture et naissance de la « pasteurisation »
En découvrant les levures et en rattachant leur fonction à la fermentation, Pasteur montra qu’il savait aussi les cultiver et les sélectionner par une nutrition appropriée, les bouillons de culture. Ces découvertes ont déterminé l’évolution future de ses travaux.
La chimie l’avait conduit à s’intéresser à l’étude des ferments, c’est-à-dire des microbes. C’est ainsi qu’il entra dans une nouvelle science, celle de la microbiologie.
Poursuivant l’étude des produits de fermentation alcoolique (1860) et de leurs dérivés (vin [1864], vinaigre [1862] et bière [1871]), il s’intéressa par la suite aux contaminations ultérieures et aux moyens de les prévenir. Il rendit ainsi de grands services à l’industrie, mettant au point la « pasteurisation » (1865), procédé de chauffage dans une zone étroite de température (de 60 à 100 °C) pendant une courte durée suivie d’un refroidissement rapide, ou introduisant chez les brasseurs anglais et danois le microscope, pour s’affranchir des levures contaminées. Ces axes de recherche et leurs applications le rapprochèrent, de manière indirecte, des problématiques infectieuses humaines et animales : Joseph Lister (1827-1912) le rappela à propos de ses découvertes sur l’antisepsie qui s’étaient inspirées des travaux de Pasteur sur la fermentation pour la prévention par l’acide phénique des suppurations secondaires des plaies.
La chimie l’avait conduit à s’intéresser à l’étude des ferments, c’est-à-dire des microbes. C’est ainsi qu’il entra dans une nouvelle science, celle de la microbiologie.
Poursuivant l’étude des produits de fermentation alcoolique (1860) et de leurs dérivés (vin [1864], vinaigre [1862] et bière [1871]), il s’intéressa par la suite aux contaminations ultérieures et aux moyens de les prévenir. Il rendit ainsi de grands services à l’industrie, mettant au point la « pasteurisation » (1865), procédé de chauffage dans une zone étroite de température (de 60 à 100 °C) pendant une courte durée suivie d’un refroidissement rapide, ou introduisant chez les brasseurs anglais et danois le microscope, pour s’affranchir des levures contaminées. Ces axes de recherche et leurs applications le rapprochèrent, de manière indirecte, des problématiques infectieuses humaines et animales : Joseph Lister (1827-1912) le rappela à propos de ses découvertes sur l’antisepsie qui s’étaient inspirées des travaux de Pasteur sur la fermentation pour la prévention par l’acide phénique des suppurations secondaires des plaies.
Pasteur associé libre à l’Académie de médecine
Au début de l’année 1873, une place devint vacante à l’Académie de médecine, dans la section des associés libres, et Pasteur, qui s’y était porté candidat, fut élu, à vrai dire à une seule voix près. Il y défendit la théorie des germes, causes d’infection, face à nombre de ses collègues qui n’y croyaient pas trop. L’antisepsie de Lister avait du mal à s’imposer. Quant à l’asepsie et aux leçons d’Ignace Philippe Semmelweis (1818-1865), elles furent longtemps ignorées, y compris de la part de Pasteur. Celui-ci avait cependant imposé le lavage des mains pour toute personne cherchant à le saluer, notamment dans son laboratoire où on lavait soigneusement le savon avant de s’en servir.
En médecine, ses contributions furent de deux ordres : montrer le rôle des microbes dans l’origine des infections, et assurer leur prévention par la mise au point de vaccins.
En médecine, ses contributions furent de deux ordres : montrer le rôle des microbes dans l’origine des infections, et assurer leur prévention par la mise au point de vaccins.
La théorie des germes à l’origine de l’asepsie
Lorsque Pasteur entra en lice dans le vaste domaine de l’infectieux, le rôle des microbes restait inconnu ou plutôt incomplètement démontré. Grâce à une démonstration par dilution limite du plasma d’animaux infectés et passage à l’étuve pour permettre aux bactéries de se multiplier, il apporta la preuve que la maladie du charbon est bien due au bacille de l’anthrax. Cette expérience, même si elle fut effectuée en parallèle par Robert Koch (1843-1910), posa les bases de la contamination par les microbes. Deux autres découvertes de Pasteur apportèrent d’importants compléments :
– l’une concerne l’introduction du bacille de l’anthrax chez les poules, qui, d’ordinaire, n’entraîne pas la mort, sauf si celles-ci sont plongées dans l’eau froide, une manipulation qui diminue la température du corps. Pasteur indiqua ainsi qu’on peut être porteur sain de germes potentiellement pathogènes à l’occasion d’une modification environnementale ;
– l’autre est la démonstration faite, à l’occasion de contaminations de ruminants par des animaux morts du charbon enterrés profondément sous terre, de la possible transmission de l’anthrax par les vers de terre (1880).
En prouvant que les bactéries peuvent être ainsi véhiculées par ces invertébrés, Pasteur a montré un aspect capital des zoonoses. Une espèce qui assure le réservoir de germes peut les transmettre à l’homme en les véhiculant par une autre espèce.
Ces démonstrations qui renforcèrent la théorie des germes conduisirent Pasteur à inculquer à ses collègues des leçons d’hygiène et d’asepsie, tel le chauffage du bistouri, qui mirent cependant longtemps à s’imposer, notamment chez les chirurgiens. Elles ne furent pas les seules mesures de prévention qu’il prôna ; ses expériences sur la vaccination lui fournirent la matière pour d’autres plaidoyers.
– l’une concerne l’introduction du bacille de l’anthrax chez les poules, qui, d’ordinaire, n’entraîne pas la mort, sauf si celles-ci sont plongées dans l’eau froide, une manipulation qui diminue la température du corps. Pasteur indiqua ainsi qu’on peut être porteur sain de germes potentiellement pathogènes à l’occasion d’une modification environnementale ;
– l’autre est la démonstration faite, à l’occasion de contaminations de ruminants par des animaux morts du charbon enterrés profondément sous terre, de la possible transmission de l’anthrax par les vers de terre (1880).
En prouvant que les bactéries peuvent être ainsi véhiculées par ces invertébrés, Pasteur a montré un aspect capital des zoonoses. Une espèce qui assure le réservoir de germes peut les transmettre à l’homme en les véhiculant par une autre espèce.
Ces démonstrations qui renforcèrent la théorie des germes conduisirent Pasteur à inculquer à ses collègues des leçons d’hygiène et d’asepsie, tel le chauffage du bistouri, qui mirent cependant longtemps à s’imposer, notamment chez les chirurgiens. Elles ne furent pas les seules mesures de prévention qu’il prôna ; ses expériences sur la vaccination lui fournirent la matière pour d’autres plaidoyers.
Inventeur des tests et de la production des vaccins
Pasteur n’a pas inventé la vaccination – dont le nom, qui provient de vacca, « vache », fut inspiré des découvertes d’Edward Jenner (1749-1823) sur la prévention de la variole –, mais la manière expérimentale de produire et de tester des vaccins.
Il appliqua diverses méthodes pour inactiver les microbes, par la chaleur, le phénol ou l’assèchement, à quatre modèles différents : le choléra des poules (1879), le charbon (1882), le rouget du porc (1883) et la rage (1880). Dans chacun des cas, il doit beaucoup à ses collaborateurs, principalement à Émile Roux. Sans revenir sur chacune de ces expérimentations, qui nécessiteraient une plus ample description, ne serait-ce que pour mettre en scène les doutes et critiques de beaucoup de ses collègues et contemporains, on ne peut que souligner le rôle majeur pris par le vaccin contre la rage dans le plaidoyer pour la vaccination (fig. 3 ). Mais la vaccination contre la rage dut, de plus, son originalité au fait qu’il s’agissait d’une vaccination thérapeutique, prévenant ainsi la maladie et non l’infection, à la différence des trois autres modèles.
Ce parcours scientifique de Pasteur pour la mise au point des vaccins ne clôt pas les conséquences de ses découvertes, puisque la vaccination antirabique a été à l’origine de l’institut qui porte son nom, inauguré le 4 juin 1887, créé grâce à une souscription publique. Mais on doit aussi admirer la poursuite et le prolongement des travaux de Pasteur par toute une génération de scientifiques qui ont exporté sa pensée dans le monde, avec la création notamment des Instituts Pasteur d’outre-mer, et son œuvre a perduré à travers l’essor de la microbiologie et la naissance de l’immunologie.
Il appliqua diverses méthodes pour inactiver les microbes, par la chaleur, le phénol ou l’assèchement, à quatre modèles différents : le choléra des poules (1879), le charbon (1882), le rouget du porc (1883) et la rage (1880). Dans chacun des cas, il doit beaucoup à ses collaborateurs, principalement à Émile Roux. Sans revenir sur chacune de ces expérimentations, qui nécessiteraient une plus ample description, ne serait-ce que pour mettre en scène les doutes et critiques de beaucoup de ses collègues et contemporains, on ne peut que souligner le rôle majeur pris par le vaccin contre la rage dans le plaidoyer pour la vaccination (
Ce parcours scientifique de Pasteur pour la mise au point des vaccins ne clôt pas les conséquences de ses découvertes, puisque la vaccination antirabique a été à l’origine de l’institut qui porte son nom, inauguré le 4 juin 1887, créé grâce à une souscription publique. Mais on doit aussi admirer la poursuite et le prolongement des travaux de Pasteur par toute une génération de scientifiques qui ont exporté sa pensée dans le monde, avec la création notamment des Instituts Pasteur d’outre-mer, et son œuvre a perduré à travers l’essor de la microbiologie et la naissance de l’immunologie.
Des recherches toujours d’actualité
À la mort de Pasteur, le 28 septembre 1895, qui fut célébrée à l’unisson de sa gloire, c’est à un pan entier des sciences qu’on devait attribuer ce qui fut appelé la « révolution pasteurienne » grâce à ses découvertes en microbiologie et au rôle des microbes dans l’industrie agroalimentaire et en pathologie infectieuse. Mais l’asymétrie moléculaire du vivant demeure encore comme une des grandes énigmes de la biologie, même si, symbolique application en astronomie des premières découvertes de Pasteur, elle constitue aujourd’hui une des mesures effectuées pour déceler une éventuelle vie à l’autre bout de l’univers.
* NDLR. Le mordançage consiste en l’adjonction de substances chimiques ayant pour fonction de créer un pont chimique entre les fibres textiles et les teintures naturelles lors de la teinture textile végétale artisanale.
Pour en savoir plus
Patrice Debré. Une journée particulière du Professeur Pasteur. Flammarion 2022.
Patrice Debré. Louis Pasteur. Flammarion 1994, coll. « Champs » 2010.
Patrice Debré. Louis Pasteur. Flammarion 1994, coll. « Champs » 2010.
Une question, un commentaire ?