Être professeur de médecine consiste à la fois à soigner, à mener des travaux de recherche et à enseigner. Quand vient le temps de la retraite se pose la question de la transmission, avec ce qu’elle comporte de partialité et d’expérience individuelle. Après avoir permis des avancées majeures dans la prise en charge de l’hypertension artérielle et de la maladie d’Alzheimer, le Pr Joël Ménard se raconte dans une trilogie pour que l’expérience d’une vie engagée puisse en porter d’autres.
Que deviennent l’écriture de livres et leur lecture face à l’augmentation du nombre des supports de l’information et à la vitesse de propagation des réussites comme des erreurs ou des tricheries ? Quelques vidéos sur YouTube sont vues en quelques heures par des millions de gens, tandis qu’une revue ou un livre peut n’être lu(e) que par quelques milliers de personnes en quelques mois. Comment alors construire le passage intergénérationnel des connaissances du xxe au xxie siècle ?
Périodiquement depuis 1951, La Revue du Praticien aborde l’hypertension artérielle et la maladie d’Alzheimer ;1-4 j’ai pu y collaborer régulièrement avec plaisir, peut-être d’ailleurs avec davantage de plaisir d’un siècle à l’autre, dans une vision évolutive et pour le souvenir de ceux et celles qui ont rendu possibles ces changements.1 Ces textes contribuent à cristalliser une mémoire individuelle de la médecine. Il en résulte l’écriture d’une trilogie intitulée « Médecin de passage », à cheval entre deux siècles et deux maladies. Ce travail illustre la nature du raisonnement médical et tente de le rendre plus visible pour tous, au milieu des changements d’époque.5-7
Périodiquement depuis 1951, La Revue du Praticien aborde l’hypertension artérielle et la maladie d’Alzheimer ;1-4 j’ai pu y collaborer régulièrement avec plaisir, peut-être d’ailleurs avec davantage de plaisir d’un siècle à l’autre, dans une vision évolutive et pour le souvenir de ceux et celles qui ont rendu possibles ces changements.1 Ces textes contribuent à cristalliser une mémoire individuelle de la médecine. Il en résulte l’écriture d’une trilogie intitulée « Médecin de passage », à cheval entre deux siècles et deux maladies. Ce travail illustre la nature du raisonnement médical et tente de le rendre plus visible pour tous, au milieu des changements d’époque.5-7
Autobiographie ou mémoires ?
Autobiographie, centrée sur une personne, et mémoires, tournées vers une époque, sont souvent placées en opposition. La distinction est pratique, mais la description « de mémoire » d’une époque ne peut se construire qu’à travers la vision personnelle qu’en a un chroniqueur : livrer ses mémoires, c’est se livrer un peu soi-même. Il est utopique d’écrire un témoignage objectif de l’évolution des connaissances sur l’hypertension artérielle et la maladie d’Alzheimer en juxtaposant histoires personnelles et événements étalés sur six ou sept décennies. La narration que l’on voudrait utile pour l’avenir se veut impartiale, car il est facile d’éviter les mensonges ou la distorsion des faits, mais elle ne peut échapper à des biais de mémorisation ou à des oublis, si l’on préfère un récit personnel à un récit historique ou à un roman.
Avec quelle ambition ?
Chacun a des raisons personnelles d’écrire ses mémoires, mais quelles sont-elles quand on a eu suffisamment de volonté et d’idéalisme pour les faire connaître ? Se rassurer d’abord sur sa propre mémoire, avant qu’elle ne décline parce que l’on a été marqué par la rencontre avec les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer ? Décrire l’histoire comme on aurait aimé qu’elle fût, quitte à prendre des libertés avec les faits ? Négliger les biais possibles ou les accepter avec désinvolture ? Être utile, parce que beaucoup cherchent où trouver des connaissances résumées, et le nombre d’informations disponibles demande un filtre de qualité quand les connaissances sont mondiales et accumulées pendant plus d’un siècle sur l’hypertension artérielle ? Se consoler peut-être, car dans l’idée qu’on peut se faire de la mort, la disparition intellectuelle ou affective est bien plus pénible que la disparition physique ?
La médecine, en émissions télévisuelles, films ou romans, passionne toujours et attire curieux et hypocondriaques. Des millions de personnes ont une hypertension artérielle susceptible de diminuer leurs années de vie en bonne santé. Des milliers de médecins, pharmaciens, infirmiers, chercheurs travaillent pour elles.
Quelque part entre humilité et orgueil, les méthodes de soins et de recherche utilisées pendant toute une vie tournée vers l’hypertension artérielle méritent d’être transmises pour faire gagner du temps à d’autres, en toute sécurité. On peut les étendre à la maladie d’Alzheimer, beaucoup moins bien comprise que l’hypertension artérielle, et les faire connaître pour éviter deux écueils. Pour l’hypertension artérielle, s’imaginer que tout est acquis, avec le risque de perdre de vue le besoin de connaissances et de progrès. Pour la maladie d’Alzheimer, s’imaginer que tout est trop difficile. Le pire serait d’alimenter une tendance à la nostalgie trop fréquemment cultivée, entretenue par une autosatisfaction ou une crainte de l’avenir entretenue par le manque de confiance en soi et dans les autres.
La médecine, en émissions télévisuelles, films ou romans, passionne toujours et attire curieux et hypocondriaques. Des millions de personnes ont une hypertension artérielle susceptible de diminuer leurs années de vie en bonne santé. Des milliers de médecins, pharmaciens, infirmiers, chercheurs travaillent pour elles.
Quelque part entre humilité et orgueil, les méthodes de soins et de recherche utilisées pendant toute une vie tournée vers l’hypertension artérielle méritent d’être transmises pour faire gagner du temps à d’autres, en toute sécurité. On peut les étendre à la maladie d’Alzheimer, beaucoup moins bien comprise que l’hypertension artérielle, et les faire connaître pour éviter deux écueils. Pour l’hypertension artérielle, s’imaginer que tout est acquis, avec le risque de perdre de vue le besoin de connaissances et de progrès. Pour la maladie d’Alzheimer, s’imaginer que tout est trop difficile. Le pire serait d’alimenter une tendance à la nostalgie trop fréquemment cultivée, entretenue par une autosatisfaction ou une crainte de l’avenir entretenue par le manque de confiance en soi et dans les autres.
Retraite et traces de vie
Tous ceux et celles qui partent à la retraite ressentent un pincement au cœur au moment de quitter un bureau, un magasin, une pièce où ils ont vécu très longtemps. À la faculté de médecine René-Descartes, mon bureau était entouré d’étagères habitées par des boîtes en carton rectangulaires : en orange, l’hypertension artérielle ; en bleu marine, la maladie d’Alzheimer ; en rouge, la santé publique et l’enseignement de la médecine fondée sur les preuves ; en marron, des lettres de malades ou de collègues qui m’avaient ému ou intéressé, des comptes-rendus de réunions, des projets de recherche...
La mémoire des connaissances acquises pendant quelques trois mille heures de travail lors de chacune de ces soixante années était devenue visuelle par les couleurs des boîtes et spatiale par la place des étagères dans une vieille armoire vitrée, meuble historique de la faculté, qui portait aussi une centaine de livres. Chaque boîte contenait une cinquantaine de photocopies d’articles scientifiques, et près de deux cents boîtes étaient ainsi rangées. Même lorsque je n’en avais pas besoin, leur présence me rassurait par cette forme colorée de ma mémoire spatiale ainsi entretenue. Les dix mille articles lus n’étaient jamais complètement oubliés grâce à ces serviteurs immobiles, atteignables à chaque instant.
À partir de 2000, l’ordinateur a relayé ce stockage coloré, et ma mémoire a régressé, ne conservant que la place d’une idée dans un ordinateur plutôt qu’un raisonnement dans un cerveau. La masse des connaissances d’hier était structurée et directement exprimée tandis qu’aujourd’hui on peut ne retenir que la place où trouver la réponse à une question sans pouvoir répondre directement, « de mémoire ».
La mémoire des connaissances acquises pendant quelques trois mille heures de travail lors de chacune de ces soixante années était devenue visuelle par les couleurs des boîtes et spatiale par la place des étagères dans une vieille armoire vitrée, meuble historique de la faculté, qui portait aussi une centaine de livres. Chaque boîte contenait une cinquantaine de photocopies d’articles scientifiques, et près de deux cents boîtes étaient ainsi rangées. Même lorsque je n’en avais pas besoin, leur présence me rassurait par cette forme colorée de ma mémoire spatiale ainsi entretenue. Les dix mille articles lus n’étaient jamais complètement oubliés grâce à ces serviteurs immobiles, atteignables à chaque instant.
À partir de 2000, l’ordinateur a relayé ce stockage coloré, et ma mémoire a régressé, ne conservant que la place d’une idée dans un ordinateur plutôt qu’un raisonnement dans un cerveau. La masse des connaissances d’hier était structurée et directement exprimée tandis qu’aujourd’hui on peut ne retenir que la place où trouver la réponse à une question sans pouvoir répondre directement, « de mémoire ».
L’importance des noms d’auteurs
Écrire des souvenirs est peut-être de l’orgueil, si l’on s’imagine que les actes d’une vie ont été originaux et utiles. Ce peut être aussi de l’humilité, quand on est bien conscient de l’étendue des contextes du temps et de l’espace. L’envie de prendre place au milieu des nombreux livres de mémoires écrits par les médecins prolonge une vie universitaire programmée pour transmettre des connaissances.
Ces ouvrages sont souvent intitulés « Ce que je crois ». Je préférerais écrire « Ce que je vois ». Une personne isolée est d’autant moins importante que, pour avancer, elle a eu besoin de beaucoup d’autres pour se façonner ; réciproquement sans doute, d’autres ont eu besoin d’elle. Il faut bien comprendre que la réalité d’une époque ne se trouve pas chez une personne isolée (dont les seuls avantages peuvent être l’esprit de synthèse ou l’humour) : une histoire individuelle est utile pour éclairer une époque ; or, bien sûr, l’éclairage d’une scène (de cinéma, d’opéra…) la construit d’une certaine façon pour lui donner une originalité. L’idéal est l’objectivité, mais est-elle atteignable ? Mieux, il faut être un peu partial pour pérenniser, à travers ses objectifs propres, des idées qui ne soient pas formelles, et permettre plus tard d’en générer de nouvelles. Si l’on dissémine involontairement des erreurs, le mouvement des connaissances les corrigera (en espérant que ce ne soit ni trop long, ni trop coûteux, ni trop dangereux) !
Tous ceux et toutes celles qui racontent une époque écrivent avec plaisir les noms de personnes parce qu’ils ont connu leur voix, leur visage, leur démarche. L’écriture des noms est un plaisir intime du narrateur, sous la forme d’un simple souvenir, d’un hommage ou d’une critique. Tandis que les doigts tapent sur le clavier, les yeux voient un visage, une mimique, une gestuelle, un message transmis à un instant donné. Quand les noms sont découverts par le lecteur, il peut être ennuyé s’il n’en a jamais entendu parler. Le but du narrateur, à cet instant de rencontre, est de donner l’envie de découvrir ces noms dans le contexte de leur époque, et trouver via PubMed un accès direct à leurs contributions dont on ne percevait auparavant ni l’importance ni même l’existence. Une approche plus humaine et plus libre que la simple analyse scientifique systématique ne réduit plus la connaissance à des articles aux structures stéréotypées. Les noms retenus, et il en manque beaucoup bien sûr, signalent des chercheurs qui ont suffisamment produit pour marquer leurs contemporains. En se les remémorant, on se réjouit de les faire aimer autant pour eux-mêmes que pour leurs contributions. Ainsi, d’autres m’ont-ils fait aimer, par leurs écrits, des romanciers, des historiens des philosophes, des musiciens, des acteurs et des metteurs en scène.
Ces ouvrages sont souvent intitulés « Ce que je crois ». Je préférerais écrire « Ce que je vois ». Une personne isolée est d’autant moins importante que, pour avancer, elle a eu besoin de beaucoup d’autres pour se façonner ; réciproquement sans doute, d’autres ont eu besoin d’elle. Il faut bien comprendre que la réalité d’une époque ne se trouve pas chez une personne isolée (dont les seuls avantages peuvent être l’esprit de synthèse ou l’humour) : une histoire individuelle est utile pour éclairer une époque ; or, bien sûr, l’éclairage d’une scène (de cinéma, d’opéra…) la construit d’une certaine façon pour lui donner une originalité. L’idéal est l’objectivité, mais est-elle atteignable ? Mieux, il faut être un peu partial pour pérenniser, à travers ses objectifs propres, des idées qui ne soient pas formelles, et permettre plus tard d’en générer de nouvelles. Si l’on dissémine involontairement des erreurs, le mouvement des connaissances les corrigera (en espérant que ce ne soit ni trop long, ni trop coûteux, ni trop dangereux) !
Tous ceux et toutes celles qui racontent une époque écrivent avec plaisir les noms de personnes parce qu’ils ont connu leur voix, leur visage, leur démarche. L’écriture des noms est un plaisir intime du narrateur, sous la forme d’un simple souvenir, d’un hommage ou d’une critique. Tandis que les doigts tapent sur le clavier, les yeux voient un visage, une mimique, une gestuelle, un message transmis à un instant donné. Quand les noms sont découverts par le lecteur, il peut être ennuyé s’il n’en a jamais entendu parler. Le but du narrateur, à cet instant de rencontre, est de donner l’envie de découvrir ces noms dans le contexte de leur époque, et trouver via PubMed un accès direct à leurs contributions dont on ne percevait auparavant ni l’importance ni même l’existence. Une approche plus humaine et plus libre que la simple analyse scientifique systématique ne réduit plus la connaissance à des articles aux structures stéréotypées. Les noms retenus, et il en manque beaucoup bien sûr, signalent des chercheurs qui ont suffisamment produit pour marquer leurs contemporains. En se les remémorant, on se réjouit de les faire aimer autant pour eux-mêmes que pour leurs contributions. Ainsi, d’autres m’ont-ils fait aimer, par leurs écrits, des romanciers, des historiens des philosophes, des musiciens, des acteurs et des metteurs en scène.
Triptyque d’une vie de médecin
La trilogie « Médecin de passage » évoque des chercheurs, le plus souvent médecins. Elle organise leurs contributions, dans le contexte général du moment, dans les instants de vie du narrateur et dans les évolutions qui précèdent ou suivront l’émergence des souvenirs déclenchée par l’écriture.
La première partie, « Du roman à la réalité », glisse de la lecture des romans d’Archibald Cronin (vie d’un médecin écossais des années 1920) au monde médical actuel.5 La vie d’un professeur de lettre anglais, David Lodge, y est aussi comparée à celle d’un professeur de médecine français vivant au même moment symbolique (avant et après l’an 2000). David Lodge décrit cette période sous le titre d’une autobiographie qui résume ses romans universitaires : « Né au bon moment ».
Le deuxième tome, « Des soins à la recherche », décrit des succès et des échecs, égayés par le rappel de quelques faiblesses humaines.6
Un troisième et dernier volume est consacré au passage d’une pathologie à une autre : de l’hypertension artérielle à la maladie d’Alzheimer.7
La première partie, « Du roman à la réalité », glisse de la lecture des romans d’Archibald Cronin (vie d’un médecin écossais des années 1920) au monde médical actuel.5 La vie d’un professeur de lettre anglais, David Lodge, y est aussi comparée à celle d’un professeur de médecine français vivant au même moment symbolique (avant et après l’an 2000). David Lodge décrit cette période sous le titre d’une autobiographie qui résume ses romans universitaires : « Né au bon moment ».
Le deuxième tome, « Des soins à la recherche », décrit des succès et des échecs, égayés par le rappel de quelques faiblesses humaines.6
Un troisième et dernier volume est consacré au passage d’une pathologie à une autre : de l’hypertension artérielle à la maladie d’Alzheimer.7
D’une maladie l’autre
Hypertension artérielle et maladie d’Alzheimer sont toutes deux décrites au début du xxe siècle. Elles sont néanmoins bien différentes dans l’évolution des connaissances qui les définissent. Les deux maladies ont chacune eu leur figure emblématique parmi les présidents des États-Unis : Franklin D. Roosevelt pour l’hypertension maligne en 1945, et Ronald Reagan pour la maladie d’Alzheimer en 2004.
Plus d’un siècle après le début des mesures tensionnelles, le traitement médical quotidien contrôle l’élévation des chiffres tensionnels au point qu’on ne sait plus faire la différence entre maladie et facteur de risque, derrière une norme arbitraire et selon les circonstances.
La maladie d’Alzheimer, quant à elle, reste figée autour des lésions histologiques cérébrales de la première malade, Mme A. D. C’est seulement un siècle après l’autopsie de son cerveau qu’a été découverte la mutation en cause. L’immensité des progrès survenus au début du xxie siècle sur l’histologie du cerveau, l’imagerie, la biochimie et la génétique n’a néanmoins pas suffi à trouver des traitements, toujours annoncés pour le lendemain.
Plus d’un siècle après le début des mesures tensionnelles, le traitement médical quotidien contrôle l’élévation des chiffres tensionnels au point qu’on ne sait plus faire la différence entre maladie et facteur de risque, derrière une norme arbitraire et selon les circonstances.
La maladie d’Alzheimer, quant à elle, reste figée autour des lésions histologiques cérébrales de la première malade, Mme A. D. C’est seulement un siècle après l’autopsie de son cerveau qu’a été découverte la mutation en cause. L’immensité des progrès survenus au début du xxie siècle sur l’histologie du cerveau, l’imagerie, la biochimie et la génétique n’a néanmoins pas suffi à trouver des traitements, toujours annoncés pour le lendemain.
La santé comme un tout
Le raisonnement médical analysant les deux maladies envisagées successivement, mais par hasard au cours de la même vie professionnelle, suscite des préoccupations parallèles : organiser les soins autour d’un médecin de famille ; rapprocher les cultures différentes de plusieurs spécialités médicales et sociales ; alimenter les financements collectifs indispensables en toute transparence et justice.
Il ne faut pas oublier ce qu’était la France des années 1950-1960. L’espérance de vie était de 74 ans pour les femmes et de 67 ans pour les hommes. Dans les hôpitaux, les patients s’alignaient dans des salles communes ; l’interne de garde était seul face aux urgences venues de l’extérieur ou de l’intérieur de l’hôpital. Le système d’enseignement, élargi à la biologie et aux nouvelles techniques médicales, était prévu dans l’hôpital universitaire à partir de 1958, mais la médecine de famille et la santé publique étaient sous-évaluées. L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ne sera créé qu’en 1964.
L’espérance de vie atteint désormais 85 ans et 4 mois pour les femmes et 79 ans et 3 mois pour les hommes. Naître vers 1940 était-il donc un bon moment ? Pour la durée de vie d’un professeur anglais ou d’un médecin français, oui, sans doute. On peut commencer sa vie sous les immeubles bombardés de Nantes, Caen, Brest, Saint-Nazaire, Dresde, Berlin. Quatre-vingts ans plus tard, malheureusement, on regarde les mêmes images de villes dévastées, Alep, Homs, Marioupol, Kiev… Les plaintes sur les conditions de vie actuelles peuvent se développer librement par l’oubli du passé, et l’on recherche pour le futur quelle est la priorité des craintes.
Il s’agit cependant d’aller de l’avant : optimiser la mesure de la pression artérielle sera utile pour mieux contrôler les patients hypertendus, avec des cibles tensionnelles classées par groupe de risque cardiovasculaire ; trouver des traitements qui bloquent l’apparition des lésions cérébrales dès le début de la maladie d’Alzheimer ; construire des stratégies « vie entière » qui visent à augmenter la durée de vie sans incapacité. à cette fin, chassons de l’esprit des médecins et des administrateurs que l’application des révisions automobiles à l’être humain pourrait être une solution et que la santé dépend de la multiplication des examens. Globalement, la santé de tous peut être améliorée par la qualité et la diffusion des formations initiale et continue sous toutes leurs formes, nouvelles et anciennes, à condition que, parallèlement, les conditions sociales progressent (taux de pauvreté, exposition aux violences quelles qu’elles soient, environnement…).
Il ne faut pas oublier ce qu’était la France des années 1950-1960. L’espérance de vie était de 74 ans pour les femmes et de 67 ans pour les hommes. Dans les hôpitaux, les patients s’alignaient dans des salles communes ; l’interne de garde était seul face aux urgences venues de l’extérieur ou de l’intérieur de l’hôpital. Le système d’enseignement, élargi à la biologie et aux nouvelles techniques médicales, était prévu dans l’hôpital universitaire à partir de 1958, mais la médecine de famille et la santé publique étaient sous-évaluées. L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ne sera créé qu’en 1964.
L’espérance de vie atteint désormais 85 ans et 4 mois pour les femmes et 79 ans et 3 mois pour les hommes. Naître vers 1940 était-il donc un bon moment ? Pour la durée de vie d’un professeur anglais ou d’un médecin français, oui, sans doute. On peut commencer sa vie sous les immeubles bombardés de Nantes, Caen, Brest, Saint-Nazaire, Dresde, Berlin. Quatre-vingts ans plus tard, malheureusement, on regarde les mêmes images de villes dévastées, Alep, Homs, Marioupol, Kiev… Les plaintes sur les conditions de vie actuelles peuvent se développer librement par l’oubli du passé, et l’on recherche pour le futur quelle est la priorité des craintes.
Il s’agit cependant d’aller de l’avant : optimiser la mesure de la pression artérielle sera utile pour mieux contrôler les patients hypertendus, avec des cibles tensionnelles classées par groupe de risque cardiovasculaire ; trouver des traitements qui bloquent l’apparition des lésions cérébrales dès le début de la maladie d’Alzheimer ; construire des stratégies « vie entière » qui visent à augmenter la durée de vie sans incapacité. à cette fin, chassons de l’esprit des médecins et des administrateurs que l’application des révisions automobiles à l’être humain pourrait être une solution et que la santé dépend de la multiplication des examens. Globalement, la santé de tous peut être améliorée par la qualité et la diffusion des formations initiale et continue sous toutes leurs formes, nouvelles et anciennes, à condition que, parallèlement, les conditions sociales progressent (taux de pauvreté, exposition aux violences quelles qu’elles soient, environnement…).
Références
1. Ménard J. Les va-et-vient de l’histoire de l’hypertension. Rev Prat 2010;60(5):638-43.
2. Ménard J. 1950-2050 : un siècle de traitement de l’hypertension artérielle. Rev Prat 2019;69(10):1069-71.
3. Postel-Vinay N, Bobrie G, Chatellier G, Ménard J. L’automesure tensionnelle à domicile doit être utilisée plus souvent. Rev Prat 2003;53(12):1281-3.
4. Ménard J. Maladies d’Alzheimer. Même en l’absence d’avancées, on doit faire mieux ! Rev Prat 2011;61(7):912-3.
5. Ménard J. Médecin de passage. Du roman à la réalité. Paris : Société des écrivains, 2018.
6. Ménard J. Médecin de passage. Des soins à la recherche. Paris : Société des écrivains, 2019.
7. Ménard J. Médecin de passage. Troisième tome. À paraître.
2. Ménard J. 1950-2050 : un siècle de traitement de l’hypertension artérielle. Rev Prat 2019;69(10):1069-71.
3. Postel-Vinay N, Bobrie G, Chatellier G, Ménard J. L’automesure tensionnelle à domicile doit être utilisée plus souvent. Rev Prat 2003;53(12):1281-3.
4. Ménard J. Maladies d’Alzheimer. Même en l’absence d’avancées, on doit faire mieux ! Rev Prat 2011;61(7):912-3.
5. Ménard J. Médecin de passage. Du roman à la réalité. Paris : Société des écrivains, 2018.
6. Ménard J. Médecin de passage. Des soins à la recherche. Paris : Société des écrivains, 2019.
7. Ménard J. Médecin de passage. Troisième tome. À paraître.
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