La réussite scolaire a un impact sur la santé

Les difficultés de l’enfant à l’école ne relèvent pas toutes du champ du handicap. Les troubles des apprentissages d’origine neurodéveloppementale (troubles du langage oral et écrit, troubles praxiques, troubles attentionnels, etc.) ou certains troubles du comportement, parfois mêmecertains refus scolaires, s’y rattachent, mais il existe de nombreuses situations d’échec scolaire sans cause apparente. Or ces enfants consultent rarement, l’échec scolaire étant alors considéré comme un problème sociologique, alors que les médecins sont aussi concernés. En effet, nos sociétés post-modernes, avec leur haut degré de technicité, imposent un accroissement des connaissances, et il a été maintes fois démontré que la possession d’un diplôme délivré par l’école protège mieux du chômage que son absence. Il a également été mis en évidence que les chômeurs ont plus de risque d’avoir une santé physique et psychique dégradée.1 Il faut donc que les médecins s’intéressent à l’évolution de l’école, son fonctionnement, la qualité des interactions qui s’y jouent tant au plan des apprentissages que des relations sociales. La France est, dans les enquêtes internationales, l’un des pays où les performances des élèves sont à 15 ans les plus dépendantes de leur milieu social.2 Il n’est pas acceptable en 2020, compte tenu de l’impact de la réussite scolaire sur la santé des individus, que 20 % des élèves soient toujours en difficulté à l’entrée en 6e.* Ces mêmes enquêtes révèlent cependant que le contexte dans lequel se déroule la scolarité a une influence aussi déterminante que l’origine sociodémographique sur la poursuite des études et la réussite scolaire. Une analyse plus fine a montré qu’en primaire c’est la relation à l’enseignant (son attitude, sa pédagogie) qui importe, alors qu’au collège c’est plutôt la qualité de vie et le ressenti d’un climat de violences au sein de l’établissement qui prévalent. S’il est peu réaliste d’espérer une amélioration rapide des conditions socio-économiques, il est possible de modifier et d’améliorer les conditions d’accueil des enfants/adolescents au sein des établis­sements scolaires. L’enquête TALIS (2013)** a montré que la priorité devrait être donnée à la formation des enseignants et à une reconnaissance accrue de l’importance de leur métier par la société. La France est l’un des pays où les enseignants doutent le plus de leurs compétences et de la reconnaissance par la société de leur mission ; 6 enseignants sur 10 déclarent être bien ou très bien préparés au plan de la pédagogie ou des pratiques en classe, alors qu’ils sont 9 sur 10 dans ce cas, en moyenne, dans les autres pays de l’enquête TALIS. À peine 5 % pensent que leur profession est valorisée dans la société, contre 31 % en moyenne dans les autres pays. La revalori­sation des carrières devrait être justifiée par une formation plus complète et continue en termes de pédagogie et de sensibilisation à la psychologie de l’enfant et de l’adolescent. Les enseignants français déclarent moins participer à des activités de formation continue que leurs collègues des autres pays (76 % contre 88 %, en moyenne, dans l’enquête TALIS). Il conviendrait d’accompagner les enseignants au-delà d’une formation initiale à la fois plus large et plus pragmatique par des actions de formation continue et de lieux d’aide leur permettant d’avoir du soutien,3 car le métier d’enseignant est difficile, quoi qu’on dise de ses avantages (vacances, fonctionnariat). En témoigne le nombre d’enseignants déprimés largement supérieur à celui rencontré dans la population générale, 2,4 fois plus élevé parmi les enseignants que pour la moyenne des salariés.***

La réussite à l’école doit permettre l’épanouis­sement des enfants, une ouverture sur le monde et la culture avant tout projet de l’acqui­sition d’un statut social, mais elle passe aussi par le bien-être des adultes qui les leur enseignent. Il est urgent d’en tenir compte et de mettre en œuvre les mesures appropriées en mettant comme priorité de l’État l’éducation des enfants et adolescents. Nicole Catheline
* En août 2018 : à l’entrée en 6e, 15 % des élèves ne maîtrisaient pas correctement le français et 27 % avaient de graves difficultés en mathématiques (chiffres de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) avec une surreprésentation des zones d’éducation prioritaires.** TALIS (Teaching and Learning International Survey) est une enquête internationale de grande envergure visant à doter les pays de l’OCDE d’informations sur l’environnement professionnel des enseignants, leurs conditions de travail, l’influence que ces facteurs exercent sur l’efficacité des établissements scolaires et des enseignants. La France y a participé pour la première fois en 2013, aux côtés de 34 pays de l’OCDE et de l’Union européenne. *** Question écrite n° 18322 de Mme Françoise Laborde (RDSE, Haute-Garonne) publiée dans le JO Sénat du 15/10/2015, p. 2411.

Au sommaire

Comportements perturbateurs de l’enfant à l’école

Les comportements perturbateurs à l’école sont un motif fréquent de consultation en médecine. Parmi ces comportements, ceux qui concernent les règles conventionnelles de la classe (se lever de sa chaise sans autorisation ou bavarder sans cesse) sont les plus communs alors que ceux qui sont liés aux règles morales (actes violents ou…

Refus scolaire

L’expérience scolaire inclut l’intégration dans les groupes de pairs, l’investissement dans les apprentissages avec la capacité de faire des choix personnels au sein du système scolaire (choix d’orientation) et la construction de soi. Cette expérience joue le rôle d’un révélateur des différents aléas ou difficultés dans le…

Difficultés d’apprentissage de l’enfant à l’école

Les difficultés d’apprentissage sont un motif fréquent de consultation. Le terme « difficultés » évoque la plainte verbalisée par les parents, plus rarement par l’enfant, et généralement signalée par l’enseignant. Il convient alors de faire la part entre « difficultés » et « trouble ». La prévalence…

Le Cartable Fantastique : une association pour aider les élèves dyspraxiques

On peut être un enfant dyspra­xique et un élève compétent. Si les difficultés rencontrées à l’école sont réelles, rien n’empêche ces enfants d’intelligence normale de conduire un projet scolaire. À condition que tous les adultes qui mettent en jeu ce projet aient bien compris ce qu’impliquent l’absence d’automatisation du geste et…

Trouble développemental de la coordination

En décembre 2019, l’Inserm a publié une expertise collective sur le trouble développemental de la coordination, ou dyspraxie.1 Ce travail repose sur l’étude, par un groupe de douze experts, de plus de 1 400 articles scientifiques. Cet article reprend les éléments essentiels et à retenir issus de ce travail.

Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap

Alors qu’une première loi en faveur des personnes handicapées avait été promulguée dès 1975,1 force est de constater que ses effets dans le champ de l’éducation se sont avérés limités. On ne détaillera pas ici les motifs de cet échec relatif, on peut cependant pointer les délais et les freins qui ont conduit notamment à la création…

10 messages clés

1 Absence de babillage à 18 mois, non-association de deux mots à 2 ans, langage incompréhensible pour un non-familier à 3 ans sont des signes préoccupants. Un bilan d’investigation doit être demandé à un(e) orthophoniste pour juger du dynamisme, afin d’éviter d’être trop attentiste ou au contraire trop…

Les messages clés

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