Une patiente âgée de 52 ans consulte pour une plaque eczématiforme érythémato-squameuse intéressant la plaque aréolo-mamelonnaire (PAM), unilatérale, débordante sur la peau, bien limitée, indolore, non prurigineuse, légèrement infiltrée apparue il y a 3 mois et persistant après l’application de stéroïdes topiques.

Pas de masse palpable, d’écoulement ou de ganglion axillaire.
Quel est votre diagnostic ?
Un eczéma de contact peut survenir à l’occasion du port d’un nouveau soutien-gorge ou d’un changement de lessive. L’atteinte est le plus souvent bilatérale, prurigineuse, sans déformation du mamelon. Les lésions sont mal limitées avec des contours émiettés et concernent la plaque aréolo-mamelonnaire. Elles peuvent s’étendre sur la peau au pourtour. Il faut rechercher des signes associés liés au terrain atopique (rhinite, asthme, conjonctivite). L’évolution se fait par poussées entrecoupées de rémissions. Parfois, les lésions sont chroniques et lichénifiées. Le traitement repose sur la corticothérapie locale intermittente.
La lésion élémentaire est une tache érythémato-squameuse, congestive, bien délimitée, recouverte d’une couche de squames sèches pouvant se détacher spontanément ou après grattage à la curette ; elle est indolore est peu ou pas prurigineuse. Localisations de prédilection : les faces d’extension des membres et les surfaces exposées aux microtraumatismes.
Elle survient dans un contexte particulier d’immunodépression, ou chez des sujets âgés vivant en collectivité. Tout le corps est atteint, y compris le visage, le cuir chevelu et les ongles. Il existe une érythrodermie (rougeur diffuse de tout le corps) avec des lésions hyperkératosiques, des squames, et des croûtes, et ce de façon très étendue. Le prurit peut être absent ou modéré. Beaucoup moins fréquente que la gale commune, c’est extrêmement contagieuse avec des milliers de parasites (Sarcoptes scabiei) dans la peau. Parfois, la gale hyperkératosique est limitée à un segment de peau. Le traitement d’épreuve s’impose au moindre doute.

La maladie de Paget (MP) mammaire se manifeste par une lésion unilatérale, puis évolue de façon centrifuge du mamelon vers l’aréole. Il s’agit d’une lésion érythémateuse suintante du mamelon, volontiers épaissie, rugueuse et squameuse. Sa surface peut être érosive, avec une ulcération et une croûte indurée à limite nette. On note une perte progressive du relief du mamelon.1 Les patientes rapportent fréquemment une douleur, une sensation de brûlure ou encore de démangeaisons au niveau du mamelon. Il faut rechercher à l’examen un écoulement mamelonnaire sérosanglant, une masse sous-jacente et/ou des adénopathies. Des améliorations transitoires sont décrites et ne doivent pas faire éliminer le diagnostic. Un signe clinique essentiel est que la MP atteint toute la PAM, alors qu’un érythème qui épargne le mamelon n’est pas une MP.2 Parfois, une MP vulvaire lui est associée.3
Le diagnostic, souvent tardif, repose sur une biopsie cutanée. Classiquement, la maladie de Paget survient entre 51 et 70 ans, mais des cas sont décrits chez la femme jeune avant 30 ans, ou plus âgée. De même, une dizaine de cas ont été rapportés chez l’homme.4


Réflexe : Devant une lésion eczématiforme unilatérale, persistante du mamelon, une biopsie cutanée doit être réalisée à la recherche d’une maladie de Paget. En effet, cette pathologie doit bénéficier d’un diagnostic à un stade précoce en raison de son association fréquente à un adénocarcinome mammaire sous-jacent.5


NB : Le nom de cette pathologie provient des cellules de Paget qui colonisent l’épiderme provenant de la migration par voie endoluminale d’un carcinome canalaire in situ (CCIS) et/ou infiltrant (CCI) associé.


Références :

1. Levy-Bencheton A, Agostini A. Dermatoses de l’aréole et du mamelon.EMC Dermatol 5 novembre 2012. 

2. Lim HS, Jeong SJ, Lee JS, et al. Paget disease of the breast: mammographic, US, and MR imaging findings with pathologic correlation.  Radiographics 2011;31(7):1973-87. 

3. Fetissoff F, Arbeille-Brassart B, Lansac J, et al. Association d’une maladie de Paget mammaire et vulvaire. Étude optique, ultrastructurale et cytochimique. Ann Dermatol Venereol 1982;109(1):43-50. 

4. Akita M, Kusunoki N, Nakajima T, et al. Paget’s disease of the male breast: a case report.  Surg Case Rep 2015;1(1):103. 

5. F. Ledoux, C. Fagot, M. Espié. Pathologies aréolomamelonnaires.  La Lettre du Sénologue n° 72 juin 2016. 

 

Par le Dr Fatima Oulhouss, médecine interne, CHP Inezgane, Maroc.

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