Vous recevez une patiente de 56 ans avec comme antécédents : un diabète de type 2 sous metformine mal équilibré, une sclérose en plaques en rémission sous ocrélizumab depuis 20 ans et une hypothyroïdie sous Levothyrox 100 µg. Vous observez des lésions ulcéronécrotiques qu’elle dit avoir depuis 5 jours.
Quel diagnostic évoquez-vous en 1er ?
Gommes, tubercules indolores, non prurigineux, de couleur rouge cuivré, de 5 à 30 mm. Configuration arciforme, circinée ou serpigineuse.
Il s’agit d’une mucormycose cutanée, mycose opportuniste due à des moisissures de l’ordre des Mucorales. Explications ci-dessous.
Le diagnostic différentiel se pose avec l’escarre stade 3, où il y a l’ulcère et la nécrose. Mais la topographie des lésions n’est pas en faveur du diagnostic : les escarres siègent dans les zones d’appui et résultent d’une immobilisation prolongée en décubitus dorsal.
Le scrofuloderme se manifeste par des nodules sous-cutanés d’évolution gommeuse en regard d’un foyer tuberculeux profond (ganglionnaire, ostéoarticulaire, épididyme). Il laisse place à une cicatrice rétractile.
Chez cette patiente, la biopsie cutanée a révélé des filaments non septés, rubanés, à bords non parallèles, évocateurs de mucormycose. La culture mycologique a isolé une mucorale du genre Mucor et la PCR était positive pour les genres Mucor/Rhizopus dans la peau et négative dans le sérum. Le pronostic vital est lié au diagnostic précoce, et à l’administration de l’amphotéricine B à forte dose 5 mg/kg/jour associée à un parage chirurgical et à la correction de comorbidités associées (diabète +++).
Réflexe :un aspect ulcéronécrotique des lésions doit conduire à la réalisation d’un prélèvement mycologique, d’autant plus chez un patient immunodéprimé.
Références :
Desoubeaux G, Leperlier M, Chaussade H, et al. [Cutaneous mucormycosis caused by Rhizopus microsporus]. Ann Dermatol Venereol 2014;141(3):201-5.
Jouhet C, Mohty AM, Taseï AM, et al. Hypodermite granulomateuse révélatrice d’une mucormycose chez une malade immunodéprimée. Ann Dermatol Venereol 2005;132(6-7):536-9.
Par le Dr Fatima Oulhouss, médecine interne, CHP Inezgane, Maroc.