Veuillez prendre connaissance de l’article suivant : Pasu S, Bell L, Zenasni Z, et al. Facedown positioning following surgery for large full-thickness macular hole: A multicenter randomized clinical trial. JAMA Ophthalmol. 2020;138(7):725-30. doi:10.1001/jamaophthalmol.2020.0987
Question 1 - La réalisation de cette étude est justifiée par les auteurs par les arguments suivants [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)] :
La technique opératoire pour traiter les trous maculaires est codifiée et consensuelle. Par contre, la gestion des patients en postopératoire ne l’est pas.
Les trous maculaires doivent être traités chirurgicalement. Cet article porte sur le positionnement postopératoire des patients.
L’injection d’une bulle de gaz en fin d’intervention est consensuelle. Par contre, l’efficacité d’un positionnement face vers le bas pour que la bulle de gaz aide à la cicatrisation du trou maculaire ne l’est pas.
L’étude a pour but de comparer l’efficacité d’un positionnement postopératoire face vers le bas des patients pour des trous maculaires de plus de 400 μm, par rapport à l’absence de positionnement.
Pour répondre à cette question, il faut lire attentivement le titre de l’étude, le paragraphe d’introduction et comprendre l’objectif de l’étude.
Question 2 - L’étude présentée ici est [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)]  :
Il s’agit d’une étude interventionnelle : ou bien les patients ont la tête vers le bas 8 heures par jour pendant 5 jours après la chirurgie, ou bien non.
Ici le patient n’est pas en aveugle du traitement qu’il reçoit. On ne peut donc pas parler de double aveugle au sens strict du terme. Par contre le chirurgien et la personne chargée d’évaluer le critère de jugement principal sont en aveugle de l’intervention.
L’essai croisé («cross-over») utilise le patient comme son propre témoin.
Il s’agit d’une étude interventionnelle comparative multicentrique.
Une étude en « cross-over » désigne une étude où, par exemple, un patient X reçoit un traitement A pendant un temps donné, puis le placebo du traitement A pendant la même durée. Le patient est alors utilisé comme son propre témoin au moment de l’analyse.
Le terme « double insu » est préféré au terme double aveugle dans les essais en ophtalmologie… Le double insu désigne une situation où le patient et le médecin investigateur sont en aveugle du groupe d’étude. Ici, les caractéristiques du traitement proposé ne permettaient pas d’être en double insu. Les auteurs ont néanmoins tout fait pour limiter les biais de classement en laissant la personne chargée d’évaluer le critère de jugement principal et le chirurgien en insu du positionnement prescrit au patient.
Question 3 - Concernant la randomisation [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)]  :
La randomisation était effectuée après la chirurgie, pour que le chirurgien soit en aveugle du traitement que le patient recevait en postopératoire au moment de l’acte chirurgical.
La randomisation par bloc de permutation « permuted blocks of size 4 or 6 » permet de s’assurer que la répartition des patients dans chaque groupe de patient est équilibrée à la fin de chaque bloc. Une permutation aléatoire de la taille des blocs permet de s’assurer qu’il n’est pas possible de prédire a priori dans quel groupe de traitement le patient sera inclus lorsque la fin d’un bloc arrive. La taille des blocs de randomisation doit rester secrète jusqu’à la fin de l’étude*.
Seul 2 groupes de patients étaient formés à l’issu de la randomisation. La stratification sur le centre permet d’avoir un nombre égal de patients dans chaque groupe, dans chaque centre.
La randomisation est de 1:1. Chaque groupe reçoit le même nombre de patients.
Il faut bien comprendre le principe d’une randomisation stratifiée sur le centre.
* La randomisation par bloc est très utile pour s’assurer d’une bonne répartition des patients dans chaque groupe d’étude. Néanmoins, si la taille des blocs est révélée, il est possible de prédire dans quel groupe le patient sera admis lorsque celui-ci est le dernier du bloc. Exemple : randomisation par bloc de 4 ; 2 patients ont été inclus dans le groupe A et 1 dans le groupe B. Le quatrième patient du bloc sera nécessairement inclus dans le groupe B. La permutation aléatoire de la taille des blocs et le maintien de la taille des blocs secret permet d’éviter ce problème.
Question 4 - Concernant le nombre de sujets théoriques à inclure dans cette étude [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)]  :
Le risque de première espèce correspond au risque alpha. Ici, les investigateurs veulent obtenir un résultat significatif avec un intervalle de confiance (IC) de 95 %, soit un risque alpha de 5 %.
Le nombre de sujets à inclure dans cette étude a été calculé a priori par les auteurs pour mettre en évidence une différence d’au moins 15 % entre les deux groupes de l’étude avec un risque alpha de 5 % (IC à 95 %) et une puissance de 85 % (soit un risque bêta de 15 %).
Le nombre de sujets à inclure pour s’assurer de mettre en évidence une différence d’au moins 15 % entre les deux groupes de traitement si l’on anticipe 10 % de perdus de vue est de 192 patients (96 dans chaque groupe), selon les calculs a priori des auteurs.
Le nombre de sujets à inclure dans une étude est calculé a priori. Il est indispensable pour la planification d’une étude de qualité. Il prend en compte la différence qu’il faut mettre en évidence entre les deux groupes (plus celle-ci est petite, plus il faut de patients), le risque de première espèce alpha et le risque de deuxième espèce bêta. Il doit aussi prendre en compte une estimation du nombre de patients qui seront perdus de vue pendant l’étude.
Question 5 - Concernant le tableau 1 [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)]  :
Il est inutile de présenter le petit p dans le tableau des caractéristiques initiales des groupes. La comparaison se fait à l’œil.
Il n’y a pas de différence significative entre les groupes sur les principaux critères étudiés dans cet essai.
Le traitement a été testé essentiellement sur des sujets caucasiens (« white »), mais en aucun cas la randomisation n’a été stratifiée sur ce critère.
Le nombre de patients dans chaque groupe est très proche (90 vs 88).
Il s’agit de l’âge médian des patients inclus (50 % ont moins de 69 ans et 50 % ont plus de 69 ans). L’âge moyen des patients n’est pas présenté.
Question 6 - Concernant le critère de jugement principal [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)]  :
Le critère de jugement principal est un critère de jugement dichotomique. Selon la partie « Statistical considerations and sample size », les critères de jugement dichotomique ont été évalués en utilisant une approche statistique de type « régression logistique » (binomiale).
Il n’est pas mentionné dans cet article d’un recours à un comité d’adjudication, c’est-à-dire un « agent » indépendant chargé de départager les cas douteux où les spécialistes n’ont pas le même avis sur l’analyse d’un cas. Il peut s’agir d’un spécialiste indépendant ou, le plus souvent, d’un panel d’experts qui discute ensemble du cas pour trouver un consensus.
Les tests statistiques ont été réalisés de manière bilatérale avec un petit p significatif lorsqu’il était inférieur à 0,05. Il s’agit donc bien d’une étude comparative qui aurait pu mettre en évidence un avantage ou un désavantage du positionnement face vers le bas.
L’odds ratio du critère de jugement principal est 3,15 mais son IC comprend la valeur 1. Il n’est pas significatif.
Une patiente de 69 ans est opérée d’un trou maculaire de l’œil droit de 470 μm. Son œil est rempli de 14 % de perfluoropropane en fin d’intervention.
Question 7 -  Les résultats de cette étude permettent d’affirmer que [une ou plusieurs réponse(s) est (sont) possible(s)]  :
Cette étude ne permet pas d’affirmer cela. La protection du cristallin des patients lorsque ceux-ci sont positionnés face vers le bas après l’opération est une hypothèse avancée par les auteurs pour expliquer la différence d’acuité visuelle observée à l’issue de l’opération.
Le tableau 3 montre une amélioration de l’acuité visuelle significativement plus importante dans le groupe face vers le bas (gain de 3 lignes sur l’échelle de Snellen [-0,57 logmar] par rapport à 1 ligne sur l’échelle de Snellen pour l’autre groupe [-0,4 logmar]).
Aucun conseil n’a été donné aux patients pour le positionnement nocturne dans cette étude.
L’analyse du critère de jugement principal a été faite pour au moins 86 patients dans chaque groupe.
Une lecture attentive de la discussion et de la conclusion permet de répondre rapidement à cette question. Il faut prendre du recul par rapport à l’article et se demander ce qu’il apporte comme connaissance pour la pratique médicale quotidienne.

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