Vous recevez aux urgences Mme M., une patiente de 63 ans qui se plaint de douleurs en fosse iliaque gauche évoluant depuis quatre jours.

Elle a comme antécédent une hypertension artérielle traitée par amlodipine 5 mg, une constipation chronique pour laquelle elle a fait une coloscopie il y a trois ans qui était normale hormis des trous dans le côlon, lui a-t-on dit.

Elle vous dit que la douleur a commencé le soir, après avoir jardiné tout l’après-midi. Elle vous signale également des brûlures mictionnelles et une majoration de sa constipation.

Elle est sous anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) depuis sept jours en raison de douleurs de coxarthrose.

Elle mesure 1,62 m et pèse 75 kg.

Cliniquement, elle a un abdomen souple, sensible en fosse iliaque gauche. Elle n’a pas de signe de choc. 

Ses constantes : température (T°) = 38,3 °C ; fréquence cardiaque (FC) = 75 bpm ; pression artérielle (PA) = 148/75 mmHg ; taux de saturation en oxygène en air ambiant = 99 %.

Question 1 - Vous évoquez comme diagnostic(s) :

La douleur typique d’appendicite est en fosse iliaque droite. Cependant il faut toujours garder à l’esprit la possibilité d’un appendice ectopique. Même si cela est peu probable, l’appendicite reste un diagnostic possible.

Symptomatologie non évocatrice. La douleur de cholécystite est souvent post-prandiale, elle se situe en hypochondre droit et est associée à des vomissements.

La douleur de pancréatite est une douleur épigastrique irradiant dans le dos.

Triade diagnostique dans l’énoncé : fièvre + douleurs en fosse iliaque + aggravation des troubles du transit.

Diagnostic possible : fièvre, douleurs en fosse iliaque gauche.

Question 2 - Afin d’étayer vos hypothèses diagnostiques, vous demandez les examens suivants :

La NFS permet d’identifier une hyperleucocytose, qui sera signe d’inflammation.

La symptomatologie n’est pas évocatrice de pancréatite, donc pas de dosage de la lipase.

Si elle est élevée, cela nous poussera à demander un scanner.

La patiente a des brûlures mictionnelles, on veut éliminer une infection urinaire. Ici, il s’agit d’une femme, donc une bandelette urinaire négative permet d’éliminer l’infection urinaire. Attention ! Chez l’homme il aurait fallu faire un examen cytobactériologique des urines (ECBU) pour l’éliminer.

Douleurs non évocatrices d’une étiologie biliaire ou hépatique car localisées en fosse iliaque gauche.

Vous recevez le bilan biologique de Mme M. :
– hémoglobine (Hg) = 11,5 g/dL avec un volume globulaire moyen (VGM) à 81fl/t ; plaquettes = 550 G/L ; leucocytes = 18 G/L ; polynucléaires neutrophiles (PNN) = 11 G/L ;

– CRP = 115 mg/L ;

–  sodium (Na) = 145 mmol/L, potassium (K+) à 4,8 mmol/L ; protides = 80 g/L, créatininémie = 80 umol/L ; urée = 5 g/L.
La bandelette urinaire est négative.

Question 3 - Pour confirmer votre diagnostic principal, vous demandez comme examen(s) :

Ici, on suspecte donc une diverticulite devant la triade fièvre + douleurs en fosse iliaque gauche + troubles du transit.
Un diverticule est une hernie de la muqueuse et de la sous-muqueuse au travers d’une zone de faiblesse de la paroi musculaire. La diverticulite correspond à une inflammation d’un ou plusieurs diverticules.
Le seul examen nécessaire au diagnostic est le scanner abdominopelvien avec injection qui confirmera le diagnostic, permettra d’identifier une éventuelle complication et guidera la thérapeutique.
L’opacification basse n’est pas nécessaire, elle n’apportera pas d’élément supplémentaire.
La coloscopie est contre-indiquée lors de la poussée de diverticulite car le risque de perforation est majoré.
L’IRM pelvienne n’est pas indiquée.

Vous avez donc demandé un scanner abdominopelvien avec injection dont voici les clichés :

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Figure 1 (Source : Hellerhoff, 7 novembre 2020)

Question 4 - D’après ce scanner, vous pouvez dire que :

Il n’y a pas de pneumopéritoine, qui signerait de l’air en extradigestif et serait donc signe de perforation.

Pas d’abcès visible au scanner.

On note sur le scanner :
– la présence de plusieurs diverticules (petites bulles d’air au sein de la paroi colique) ;
– un épaississement de la paroi colique ;
– une infiltration de la graisse péridiverticulaire.

On voit du produit de contraste dans le tube digestif (fig. 2).

On ne voit pas de dilatation colique ni de jonction segment plat-segment dilaté.

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Figure 2 (Source : Hellerhoff, 7 novembre 2020)

Les signes de diverticulite au scanner sont :
– l’épaississement de la paroi colique ;
– l’infiltration de la graisse autour des diverticules.
 
Les complications qu’on peut identifier sur le scanner sont :
– l’abcès (collection liquidienne) ;
– la péritonite (air à l’extérieur du tube digestif) ;
– la fistule entre la vessie et le sigmoïde (bulles d’air dans la vessie).

Mme M. souffre donc d’une poussée de diverticulite non compliquée.

Question 5 - Vous identifiez chez Mme M. comme facteur(s) de risque de cette pathologie et de ses complications :

Facteurs de risque de développer une diverticulose :
– la sédentarité ;
– le surpoids ;
– la constipation ;
– le tabac.
 
Facteurs de risque favorisation les complications de la diverticulose :
– AINS ;
– corticoïdes ;
– immunosuppresseur.

Mme M. a donc une poussée de diverticulite. Vous n’identifiez pas d’abcès, de fistule ou de sténose sur le scanner.

Question 6 - Concernant la suite de votre prise en charge :

Mme M. n’a pas de comorbidité majeure. Elle a un score ASA à II (fig. 3).
-> Poussée de diverticulite non compliquée (fig. 4) chez une patiente n’ayant pas de terrain de fragilité majeur : pas de nécessité d’hospitalisation ni d’antibiothérapie.

Les critères d’hospitalisation dans la diverticulite sont :
– diverticulite compliquée (fig. 5) ;
– immunodépression ;
– grossesse ;
– score ASA > 3 ;
– signes de gravité clinique : tachycardie, hypotension, polypnée, confusion.

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Figure 3 (Source : Élisabeth Capelle, La Revue du Praticien)
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Figure 4 (Source : Haute Autorité de santé. Prise en charge médicale et chirurgicale de la diverticulite colique. 12 décembre 2017.)

Mme M. revient aux urgences cinq jours plus tard car elle est pliée de douleurs et a des vomissements.
Ses constantes : FC = 130 bpm ; PA = 90/60 mmHg ; saturation en oxygène en air ambiant = 99 % ; fréquence respiratoire (FR) = 20/min.
Cliniquement, elle a une contracture généralisée, des marbrures des membres inférieurs et une froideur des extrémités.
Au scanner abdominopelvien, on voit un aspect de sigmoïdite compliquée d’un abcès de 4 cm.

Question 7 - Concernant la suite de votre prise en charge :

Mme M. a des signes de péritonite, elle a donc une indication à une prise en charge chirurgicale.

Il faut y associer une prise en charge chirurgicale.

Le G5 % n’est pas un soluté de remplissage. Il faut en effet remplir la patiente car elle est en choc mais avec du Ringer Lactate ou du NaCl 0,9 %.

Pas d’indication devant la mauvaise tolérance clinique : il faut opérer.

L’intervention de Hartmann consiste à retirer le segment de côlon malade, mettre le segment proximal à la peau en réalisant une colostomie de décharge et obturer le segment distal.

 

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Figure 5 (Source : Haute Autorité de santé. Prise en charge médicale et chirurgicale de la diverticulite colique. 12 décembre 2017.)


 

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