Vous recevez aux urgences Mme G., 54 ans, qui s’inquiète de l’apparition de taches multiples sur ses bras et ses jambes depuis la veille. Cette patiente est suivie dans votre hôpital pour une uvéite granulomateuse bilatérale étiquetée, stable depuis plusieurs années sous adalimumab. 

Elle est originaire du Maroc, en France depuis trente ans, travaille dans l’administration, ne fume pas. Son dernier voyage au Maroc date de l’année dernière, pas de voyage exotique. 

À l’examen clinique, vous constatez effectivement des lésions violacées qui ne s’effacent pas à la vitropression au niveau des bras, des jambes et du tronc.
Question 1 - Quels sont les trois éléments que vous devez rechercher en priorité à l’interrogatoire ? 
Devant un purpura, les grandes urgences vitales à éliminer sont le purpura fulminans et l’hémorragie.
Le purpura fulminans : il s’agit d’un choc septique avec coagulation intravasculaire diffuse (CIVD), souvent secondaire à une bactériémie à méningocoque. On le suspecte en priorité devant un contexte de fièvre, un syndrome méningé. 
Le syndrome hémorragique : présence d’un saignement extériorisé, d’une déglobulisation ; saignement cérébral.
La patiente est apyrétique. Sa pression artérielle est normale, l’hémodynamique est stable et l’état général conservé. En dehors des lésions cutanées, elle ne se plaint de rien. Les lésions sont ponctiformes et siègent au niveau des bras, des jambes et du tronc. Elles ne sont pas en relief, il n’y a pas de nécrose cutanée. 
Question 2 - Que pouvez-vous dire de ces lésions ? Une ou plusieurs réponse(s) est/sont exacte(s).
Les purpura vascularitiques sont infiltrés et parfois nécrotiques, ils prédominent dans les zones déclives.
Il s’agit d’un purpura pétéchial non infiltré typique de purpura thrombopénique.
La CIVD est avant tout un diagnostic biologique et peut s’accompagner de manifestations tout d’abord thrombotiques (veineuses le plus souvent), et aux stades avancés de saignements aux points de ponction de défaillance multiviscérale. Pas de purpura pétéchial dans la CIVD.
Absence d’argument pour une nécrose cutanée (tableau 1).
Les méningococcémies peuvent d’accompagner d’un état de choc d’aggravation rapide avec CIVD sévère, que l’on regroupe sous le terme de « purpura fulminans », ce n’est pas du tout le tableau ici.
Tableau 1 (HAS. PNDS. Purpura thrombopénique immunologique de l’enfant et de l’adulte. mai 2017)
Vous recevez la numération formule sanguine (NFS) : hémoglobine (Hb) = 13,7 g/dL ; volume globulaire moyen (VGM) = 87 fL ; leucocytes = 4 G/L ; polynucléaires neutrophiles = 1,7 G/L ; lymphocytes = 1,8 G/L ; éosinophiles = 0,03 G/L ; basophiles = 0,01 G/L ; monocytes = 0,7 G/L ; plaquettes = 4 G/L ; réticulocytes = 90 G/L. La formule a été vérifiée sur lame et le frottis sanguin est sans anomalie. 
Taux de prothrombine (TP) = 99 % ; temps de céphaline activée (TCA) ; ratio patient/témoin = 1,01.
Sodium (Na) = 136 mmol/L ; potassium (K+) = 4,1 mmol/L ; chlore (Cl) = 111 mmol/L ; urée = 4,3 mmol/L ; créatinine = 51 µmol/L ; protéine C réactive (CRP) < 5 mg/L ; aspartate aminotransférase (ASAT) = 10 UI/L ; alanine aminotransférase (ALAT) = 17 UI/L ; gamma-glutamyl transférase (GGT) = 34 U/L ; phosphotases alcalines (PAL) = 24 U/L ; bilirubine totale = 4 µmol/L ; lactates déshydrogénases (LDH) = 40 U/L. 
La patiente ne décrit pas de saignement urinaire, digestif ou gynécologique ; absence de céphalée.
Question 3 - Quel(s) examen(s) prescrivez-vous ?
Voir tableau 2 (extrait du Protocole national de diagnostic et de soins - Purpura thrombopénique immunologique de l’enfant et de l’adulte [PNDS-PTI]). La patiente a moins de 65 ans, l’anomalie concerne une seule lignée, il n’y a pas d’anomalie du frottis sanguin, par conséquent on peut se passer du myélogramme.
Tableau 2 (HAS. PNDS. Purpura thrombopénique immunologique de l’enfant et de l’adulte. mai 2017)
 Question 4 - Quelle(s) donnée(s) cruciale(s) manque(nt) à votre examen clinique ? 
La présence de bulles intrabuccales est à vérifier absolument car leur présence ferait pencher la balance vers l’administration d’immunoglobulines.
Vous constatez la présence de bulles hémorragiques au niveau de la face interne de la joue gauche et du voile du palais. 
Question 5 - Quelle(s) est/sont la/les mesure(s) que vous prenez ? 
En cas de chiffre de plaquettes < 30 G/L, il y a une indication à une corticothérapie par voie générale. Il peut d’agir de prednisone 1 mg/kg ou bien de dexaméthasone 40 mg/j pendant 4 jours. Peu de place pour les bolus de méthylprednisolone. À votre niveau, retenez que la corticothérapie est indiquée. 
L’administration des IGIV est dictée par le score hémorragique de Khellaf (tableau 1) supérieur à 8. 
Dans le purpura thrombopénique immunologique, les transfusions de plaquettes ne sont pas indiquées en dehors des situations de saignement actif menaçant le pronostic vital (par exemple une hémorragie cérébrale). Le cas échéant, elles doivent être effectuées en fractionnant toutes les 8 heures. 
En effet, il y a un risque théorique d’aggravation de l’immunisation contre les plaquettes. 
Le rituximab n’est pas indiqué en première intention, mais peut constituer une alternative en cas d’échec d’autres lignes de traitement. 
Quant au mycophénolate mofétil, il n’a pas de réelle place dans la prise en charge du purpura thrombopénique immunologique.  
Pour l’algorithme thérapeutique du Protocole national de diagnostic et de soins, référez-vous à la figure.
Figure (HAS. PNDS. Purpura thrombopénique immunologique de l’enfant et de l’adulte. mai 2017)
Vous décidez d’administrer une cure d’immunoglobulines polyvalentes (1 g/kg) et un traitement oral par dexaméthasone (40 mg/j pendant 4 jours).
Question 6 - Quelle(s) mesure(s) supplémentaire(s) prenez-vous ? 
Pas besoin car la corticothérapie sera de courte durée.
Pas indiquée en prophylaxie primaire en cas de corticothérapie non associée à un autre immunosuppresseur.
Contre-indiquée par la profondeur de la thrombopénie.
Oui, chez une patiente qui sera amenée à peut-être recevoir plusieurs lignes de traitement immunosuppresseur, en cas de mauvaise évolution du purpura thrombopénique immunologique.
Ne fait pas partie des vaccins recommandés chez l’immunodéprimé. Qui plus est, il s’agit d’un vaccin vivant atténué qu’il faut éviter chez l’immunodéprimé.
Le lendemain, le chiffre de plaquettes est à 30 G/L, le surlendemain à 70 G/L. Vous décidez de ne pas répéter les IGIV, et la patiente retourne à domicile.
Vous continuez à la suivre en consultation et au fil des semaines vous recevez par fax ses résultats de biologie. Après relecture du dossier en staff, vous décidez de poursuivre les anti-TNF alpha étant donné la faible positivité d’un lien avec le purpura thrombopénique immunologique. 
Quelques années plus tard, vous recevez la NFS suivante :
Hb = 14,2 g/dL ; VGM = 89 fL ; plaquettes = 170 G/L ; neutrophiles = 2 G/L ; éosinophiles = 0,4 G/L ; basophiles = 0,01 G/L ; lymphocytes = 6,2 G/L. Vous voyez la patiente en consultation à ce moment-là, vous palpez des ganglions axillaires bilatéraux indolores, centimétriques. 
Vous appelez son laboratoire de ville et, en regardant les antériorités, vous vous apercevez que les numérations antérieures sont similaires depuis quelques mois.
Question 7 - Quel(s) est/sont l’/les examen(s) dont vous avez besoin à ce stade ? 
Devant une lymphocytose persistante, la première pathologie à évoquer est la leucémie lymphoïde chronique dont le diagnostic se fait sur sang périphérique à l’aide d’un immunophénotypage lymphocytaire et du calcul du score de Matutes. Le recours à l’histologie n’est nécessaire qu’en cas de score de Matutes douteux.

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