Un homme âgé de 47 ans arrive aux urgences pour une douleur épigastrique brutale, apparue hier soir après un repas copieux.

Dans ses antécédents, on note une hypertension artérielle mal contrôlée, un tabagisme à 60 paquets-années, et des douleurs lombaires pour lesquelles il s’automédique par ibuprofène.

Il dit également consommer 1 litre de vin par jour et 2 verres de rhum à l’apéro du midi et du soir.

À l’examen : pression artérielle = 160/90 mmHg ; fréquence cardiaque = 90 bpm ; température = 37,2 °C.

Il existe une sensibilité modérée épigastrique, sans masse palpée. Pas d’arrêt des matières et des gaz. Pas de vomissement. Orifices herniaires libres.

Le reste de l’examen est sans particularité.
Question 1 - Quels sont les diagnostics à évoquer en urgence devant cette douleur épigastrique aiguë ? (Une ou plusieurs réponses exactes)
Pas d’ictère ni de fièvre ici
À évoquer devant des douleurs épigastriques brutales, sans fièvre, sans ictère :
– l’ulcère gastrique (anti-inflammatoires non stéroïdiens [AINS] ++) ;
– l’infarctus du myocarde (facteurs de risque cardiovasculaire ++) ;
– la pancréatite aiguë ;
– l’anévrysme de l’aorte compliqué (syndrome fissuraire).
Question 2 - Quel(s) examen(s) vous semble(nt) indispensable(s) en première intention ?
Selon les recommandations nationales sur la pancréatite aux urgences, le bilan initial doit comprendre le bilan hépatique, la glycémie, la calcémie, la triglycéridémie et une échographie des voies biliaires.
Vous réalisez un bilan standard, ainsi qu’un ECG dont voici le résultat.
NB : QTc = 404 ms.
Figure 1 (Source : Salomé Oranger, La Revue du Praticien)
Question 3 - Parmi les assertions suivantes, laquelle ou lesquelles est/sont exacte(s) ?
Sur l’ECG, chaque complexe QRS est précédé par une onde P et chaque onde P est suivie par un complexe QRS. L’onde P doit avoir les caractéristiques d’une onde P sinusale (axe, forme…). La fréquence sinusale normale au repos chez l’adulte est comprise entre 60 et 100 par minute.
QRS large > 0,12 s.
Aspect QS en V1.
Aspect R exclusif en V6.
Ondes T (-) V5, V6, AVL, DI.
Déviation axiale gauche modérée.
Figure 2 (Source : Salomé Oranger, La Revue du Praticien)
QRS large > 0,12 s.
Aspect rR’ en V1.
Onde S traînante en DI et V6.
Ondes T (-) en V1-V2 parfois V3.
Intervalle PR 0,2 s.
Pas de tachycardie, 360 ms ≤ QTc ≤ 450 ms, PR 200 ms, pas de troubles du rythme, ondes non plates.
Le bilan biologique que vous avez demandé est le suivant :
– globules blancs (GB) = 19 G/L ; plaquettes = 140 000/mm3 ; hémoglobine (Hb) = 13 g/dL ;
– créatinine = 75 micromol/L ;
– protéine C réactive (CRP) = 7 mg/L ;
– ionogramme sanguin normal ;
– alanine aminotransférase (ALAT) = 3N ; aspartate aminotransférase (ASAT) = 2N ; phosphatase alcaline (PAL) et gamma-glutamyl transférase (GGT) normales ;
– bilirubinémie = 13 micromol/L ;
– lipase = 800 (N < 60) ;
– calcémie = 2,40 mmol/L ; albumine = 35 g/dL.
Question 4 - Parmi les assertions suivantes, laquelle ou lesquelles est/sont exacte(s) ?
Pas de corrélation biologique avec la sévérité.
La pancréatite aiguë est retenue sur douleur abdominale + lipase > 3 N.
Ce diagnostic reste possible mais n’est pas étayé par l’observation de calculs ; l’origine alcoolique est également probable sur ce terrain.
Inutile dans le suivi.
Tomodensitométrie (TDM) à distance, à 72 - 96 h de la douleur.
Examen généralement non indiqué en urgence (sauf obstruction de la voie biliaire principale) et encore moins sans avoir la confirmation d’une origine lithiasique.
Vous retenez le diagnostic de pancréatite aiguë.
Question 5 - Quelle(s) est/sont la ou les assertion(s) exacte(s) concernant les mesures urgentes à mettre en œuvre chez ce patient ?
Associée à des antalgiques et une hydratation intraveineuse.
L’alimentation parentérale a plus de complication que l’entérale, qui sera donc à privilégier dans ce cadre, notamment en cas de forme sévère ou dénutrition.
En effet, la dénutrition majore le risque de complications, notamment le syndrome de réponse inflammatoire systémique (SRIS).
Il n’y a pas d’indication à une antibiothérapie sauf en cas de cholécystite ou angiocholite associée.
Le patient n'a pas de vomissement incoercible.
Les IPP en prévention de l’ulcère de stress doivent être mis en route en cas de pancréatite aiguë grave chez un patient hospitalisé en unité de surveillance continue (USC) ou réanimation.
Au décours de la prise en charge, il a une dyspnée s’aggravant rapidement dans la matinée.
Pression artérielle (PA) = 95/60 mmHg ; fréquence cardiaque (FC) = 170 bpm ; saturation en oxygène = 91 % en air ambiant ; fréquence respiratoire (FR) = 25/min.
Question 6 - Quels paramètres cliniques sont à prendre en compte dans l’évaluation de la gravité de cette pancréatite ? (Une ou plusieurs réponses exactes)
Critère du SRIS.
Critère du SRIS.
Le SRIS est défini par l’association de deux de ces quatre critères :
– température corporelle > 38 °C ou < 36 °C ;
– rythme cardiaque > 90 bpm ;
– rythme respiratoire > 20/min ou hyperventilation se traduisant par une PaCO2 < 32 mmHg (< 4,3 kPa) en air ambiant ;
– leucocytes > 12 000/mm3 ou < 4 000/mm3 ou > 10 % de cellules immatures (en l’absence d’autres causes connues).
C’est le seul score qui permet de définir la gravité d’une pancréatite aiguë.
Le patient se dégrade rapidement et vous le transférez en réanimation. Vous faites réaliser une radiographie des poumons, que voici :
Figure 3 (Source : Salomé Oranger, La Revue du Praticien)
Question 7 - Quelle(s) est/sont la ou les assertion(s) exacte(s) concernant cette radiographie ?
On ne visualise pas bien le cul-de-sac pleural gauche, le patient n’est pas debout.
La pancréatite aiguë sévère, caractérisée par une dysfonction d’organe prolongée, est grevée d’une mortalité allant jusqu’à 50 %. Parmi les dysfonctions d’organe, la dysfonction respiratoire est la plus fréquente, et le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) représente l’atteinte respiratoire la plus grave.
SDRA : insuffisance respiratoire aiguë sévère avec œdème pulmonaire et hypoxémie.
Sévérité selon le degré d’hypoxémie : pression partielle d’oxygène/fraction inspirée en oxygène (PaO2/FiO2).
Trois classes :
– SDRA légers (PaO2/FiO2 entre 201 et 300 mmHg) ;
– SDRA modérés (PaO2/FiO2 entre 101 et 200 mmHg) ;
– SDRA sévères (PaO2/FiO2 ≤ 100 mmHg).
Critères de qualité d’une radio du thorax de face :
– identité du malade ;
– date et côté droit du film marqué ;
– position debout : visualisation de la poche à air gastrique en sous-diaphragmatique gauche ;
– face stricte : extrémités internes des clavicules symétriques par rapport à la ligne des épineuses dorsales ;
– inspiration profonde : au moins 6 arcs costaux antérieurs au-dessus du diaphragme ;
– apnées : diaphragmes nets ;
– cliché bien centré : visualisation des apex et des culs-de-sac ;
– noircissement correct (haute tension) : visibilité des premières vertèbres dorsales au-dessus du cœur (reste deviné derrière l’ombre cardiaque), et trame vasculaire ;
– cliché sans superposition : omoplates bien dégagées.

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