M. T., âgé de 28 ans, va aux urgences à 9 h 30 pour une douleur testiculaire droite brutale qui dure depuis 7 h du matin. Il a pour antécédent une chirurgie d’abaissement testiculaire pour cryptorchidie bilatérale dans l’enfance. Il fume du cannabis de façon occasionnelle.

La douleur n’a pas cédé par la prise de paracétamol. Il n’a pas de brûlure mictionnelle, pas de signes fonctionnels urinaires. Il n’y a pas de notion de rapports sexuels à risque ou de traumatisme.

Il décrit la présence d’une zone indurée au niveau du testicule droit depuis maintenant plusieurs mois, mais qui ne l’a pas amené à consulter du fait de l’absence de douleurs ou de gêne.

Il est apyrétique, les constantes sont bonnes, si ce n’est une fréquence cardiaque à 105 battements par minute.

L’abdomen est souple, non douloureux à la palpation. Les aires ganglionnaires sont libres. Les deux testicules semblent au fond des bourses. Elles n'ont pas augmenté de volume et sont peu inflammatoires. Le testicule droit est douloureux à la palpation, non soulagé par son soutènement. L’épididyme et le cordon sont perçus sans anomalies. Vous palpez en effet une masse indurée au niveau de la face latérale du testicule droit.
Question 1 - Vous évoquez le(s) diagnostic(s) suivant(s) :
Ici, du fait de son antécédent d’abaissement testiculaire, le risque de torsion est assez faible car l’abaissement testiculaire mime une orchidopexie et réduit le risque de torsion.
Cependant, ce diagnostic reste à évoquer devant toute douleur testiculaire brutale, à tout âge chez l’homme (mais principalement chez les nourrissons et les jeunes entre 12 et 18-20 ans), et à explorer par scrototomie au moindre doute.
Pas d’élément à l’interrogatoire ou à l’examen clinique en faveur d’un problème infectieux.
Pas de notion de traumatisme.
Les diagnostics de nécrose tumorale et d’hémorragie intratumorale du testicule sont exceptionnels mais peuvent mimer des épisodes de torsion testiculaire. La donnée de « zone indurée » depuis plusieurs mois et l’antécédent de dysgénésie gonadique sont des éléments supplémentaires devant faire penser à ces diagnostics. Ces diagnostics différentiels sont évoqués dans le Collège d’urologie (5e édition, connaissance de rang B). Ces connaissances peuvent donc être demandées, cependant il faut retenir que, devant un tableau de douleur brutale du testicule, quel que soit l’âge, les antécédents, ou les données de l’examen clinique, il faut évoquer la torsion du cordon spermatique (c’est une urgence en termes de fonction testiculaire et de viabilité de l’organe, en plus d’être une urgence sur le plan antalgique).
Un avis est pris auprès de l’urologue d’astreinte qui vient examiner le patient. Compte tenu des données de l’interrogatoire, de l’examen clinique et du tableau de torsion testiculaire finalement non retenu, une échographie testiculaire est alors demandée.
L’échographie testiculaire droite retrouve la présence d’une lésion d’allure tumorale avec un contenu hyperéchogène faisant évoquer un saignement récent en son centre. Le reste du testicule droit ainsi que le testicule controlatéral semblent contenir des microcalcifications multiples. Il n’y a pas d’anomalie de la vascularisation au Doppler.
Le patient est finalement soulagé par la prise d’antalgiques de palier 2 et d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS).
Question 2 - Vous demandez en semi-urgence :
Bilan d’extension en première intention à la recherche de métastases ganglionnaires ou viscérales.
Seulement en cas de point d’appel clinique.
Pas en première intention (peut être utilisée pour le suivi des séminomes, mais n’est pas à retenir).
Jamais de biopsie testiculaire dans le cadre carcinologique (peut se discuter dans le cadre des infertilités sévères masculines).
Va constituer l’élément central du diagnostic positif de cancer du testicule, définir l’origine histologique de la lésion, et constituer le traitement curatif pour les tumeurs localisées.
Devant une tumeur du testicule, les examens à réaliser sont :
– échographie scrotale ;
– TAP-scan (+/- IRM hépatique ou cérébrale) ;
– biologie sanguine : alpha-fœtoprotéine (AFP) + LDH (lactate deshydrogénase) + hCG (hormon growth factor) totaux (et NON pas la sous-unité bêta uniquement). Ils peuvent être spécifiques d’un type histologique, vont permettre de classer le risque évolutif de la tumeur et vont permettre de suivre la réponse au traitement dans les dormes métastatiques ;
– proposition OBLIGATOIRE de prélèvement de gamètes auprès du Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS) ;
– orchidectomie totale par voie inguinale.
Le rendez-vous est pris auprès du centre de radiologie, de l’anesthésiste et de l’urologue.
Question 3 - Vous prescrivez le(s) examen(s) biologique(s) suivant(s) :
Risquerait d’induire des faux-négatifs.
À proposer obligatoirement avant tout traitement par chirurgie, chimiothérapie ou radiothérapie.
Voir la réponse à la question 2.
Les éléments du bilan et de l’orchidectomie révèleront une tumeur du testicule droit germinale séminomateuse avec quelques ganglions latéro-aortiques droits. Un prélèvement de gamètes a été préalablement réalisé au CECOS.
Il est décidé de réaliser un traitement complémentaire par radiothérapie en « crosse de hockey » au niveau aorto-iliaque. Les marqueurs sont restés indosables depuis ce traitement.
M. T. revient vous voir à l’âge de 35 ans., accompagné par sa femme âgée de 34 ans. Aucun des deux n’a eu d’enfant. M. T. est G0P0. Ils ont arrêté toute contraception depuis un an du fait d’un souhait d’avoir des enfants, en vain.
À l’interrogatoire et à l’examen clinique vous ne retrouvez pas d’éléments nouveaux susceptibles d’orienter votre diagnostic.
Question 4 - Vous prescrivez à M. T. en première intention pour le bilan d’infertilité :
Ce bilan sert uniquement au suivi du cancer du testicule. On nous dit que les marqueurs sont restés négatifs par ailleurs.
Recherche d’un nodule testiculaire (cancer du testicule). Volume de chaque testicule (hypotrophie 15 mL ; atrophie 6 mL). Recherche d’une pathologie obstructive ou d’une varicocèle.
En effet, la préservation des gamètes de M. T. peut faciliter la prise en charge en cas d’infertilité masculine. Cependant, les facteurs de risque de M. T. qui étaient la cryptorchidie et le cancer du testicule ne concernent pas le testis restant et, d’après les informations disponibles, il n’a pas été exposé à des traitements à risque d’infertilité tels que la radiothérapie externe et la chimiothérapie.
De ce fait il peut tout à fait avoir une spermatogenèse suffisante qu’il convient d’explorer par un bilan de base.
Bilan minimal d’infertilité chez l’homme :
– spermogramme ;
– FSH et testostérone totale ;
– échographie scrotale.
Vous revoyez le patient avec son bilan réalisé qui retrouve :
– un volume éjaculé́ de 4 mL, avec une absence totale de spermatozoïdes, et un nombre de PNN de 2 000/mL ;
– la FSH et la testostérone totale sont normales ;
– l’échographie abdominale et scrotale n’a pas réussi à mettre en évidence d’anomalies spécifiques.
Question 5 - Votre diagnostic se porte vers :
Pas de leucospermie.
Échographie scrotale normale.
Taux de FSH normal.
Azoospermie avec un bilan hormonal normal et un antécédent d’abaissement testiculaire bilatéral.
Taux de FSH normal.
Anomalie du spermogramme :
– hypospermie : volume éjaculé < 1,5 mL ; 
– oligospermie : nombre de spermatozoïdes < 15 millions/mL ou < 39 millions par éjaculat ;
– asthénospermie : < 32 % de spermatozoïdes mobiles progressifs ;
– nécrospermie : < 58 % de spermatozoïdes vivants ;
– tératospermie : < 4 % de spermatozoïdes de morphologie normale (classification de Kruger)
– leucospermie : nombre de PNN > 1 million/mL.
Ici on est face à un cas d’azoospermie. Le taux de FSH est normal, ce qui élimine le syndrome de Klinefelter qui aurait un taux de FSH élevé et une tumeur hypophysaire qui aurait un taux de FSH effondré.
Les PNN sont inférieurs à 1 million/mL et le tableau clinique n’évoque pas une cause infectieuse.
Au vu des antécédents, on s’oriente prioritairement vers une cause chirurgicale.
Le bilan d’infertilité de la compagne de M. T. n’a révélé aucune anomalie.
Question 6 - Compte tenu des éléments à votre disposition, vous allez proposer au couple comme technique(s) d’aide à la procréation en première intention :
Indiqué pour les infertilités d’origine cervicale chez la femme ou d’infertilité masculine éjaculatoire.
– En cas de stérilité masculine.
– En cas de risque élevé de transmission paternelle d’une maladie génétique grave inaccessible au diagnostic préimplantatoire ou au diagnostic prénatal.
– Également face à une oligospermie extrême ou d’azoospermie après échec de recueil chirurgical de spermatozoïdes ou d’échecs de FIV (+ ICSI).
Envisageable dans cette situation mais en dernière intention
Indications :
– Infertilité tubaire ;
– Endométriose ;
– Infertilités dites « idiopathiques ».
En cas d’infertilité d’origine masculine.
Elle s’adresse en premier lieu aux cas d’oligo-asthéno-térato-spermie (OATS) sévère, ou aux situations d’échecs antérieurs de FIV.
L’insémination avec sperme du conjoint est la technique la moins invasive, donc à privilégier en l’absence de trouble de la fertilité féminine et de gamètes masculines disponibles. M. T. avait fait conserver des gamètes au CECOS avant son traitement oncologique, on peut donc proposer cette technique d’aide médicale à la procréation au couple.
Voir item 38 : Assistance médicale à la procréation (AMP) : principaux aspects biologiques, médicaux et éthiques, Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF).
Les gamètes de M. T. conservées au CECOS sont exploitables et le couple est d’accord pour une insémination artificielle.
Question 7 - Vous leur expliquez les prochaines étapes nécessaires avant la réalisation de l’insémination :
L’insémination artificielle intra-utérine est associée à de bons résultats qu’en cas de stimulation ovarienne préalable.
Pour cela il faut stimuler la folliculogenèse de l’ovaire par administration de FSH, puis, lorsque les follicules sont suffisamment mature, déclencher l’ovulation par l’administration d’hCG recombinante.
Classiquement, on réalise l’insémination 36 h après le déclenchement de l’ovulation.
On peut également surveiller la survenue d’un pic spontané de LH chez la conjointe après la stimulation ovarienne et réaliser l’insémination à ce moment précis.

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