Un patient consulte car il est inquiet de cette « peau qui lui pousse sur l’œil gauche ». Il se plaint d’un œil désormais rouge en permanence « vers l’intérieur », avec des crises inflammatoires paroxystiques qui durent une semaine environ au cours desquelles l’œil est encore plus rouge et devient très gênant. La progression est lente depuis des années, mais semble s’accélérer ces derniers mois.
Que pouvez-vous en conclure ?
C’est une lésion dégénérative non traumatique. Son origine combinerait l’origine ethnique, l’exposition cumulée aux UV et à la sécheresse, sur un terrain de fragilité limbique mal déterminée.
Il s’agit d’un ptérygion typique. La physiopathologie répond à une insuffisance en cellules souches épithéliales cornéennes du limbe. Il s’agit d’un remplacement tissulaire mais pas d’une métaplasie, ni d’une dysplasie. Il n’y a plus de barrière fonctionnelle à la progression de l’épithélium conjonctival en cornée. Le front grisâtre de progression (Ilots de Fuchs) témoigne d’une progression active.
La courbe évolutive semble active. L’aspect local est aussi en faveur d’une évolution actuelle. L’extrémité proximale affleure la pupille en myosis photopique. Le ptérygion peut parfaitement créer un astigmatisme induit irrégulier donc mal corrigeable en lunette ou envahir l’axe visuel. Attendre l’envahissement de l’axe fait prendre le risque d’une taie obturante cicatricielle, même une fois la lésion enlevée chirurgicalement.
Cela aidera à réduire les crises inflammatoires qui seraient en partie à l’origine de la progression et qui sont invalidantes. Cela préparera de manière optimale l’étape chirurgicale.
Le pronostic visuel est en jeu. Trop attendre avant de réséquer la lésion fait prendre le risque de l’envahissement de l’axe visuel avec la conséquence détaillée plus haut. Ce faisant, la pièce opératoire est analysée car une surprise n’est jamais totalement exclue et un certain degré de dysplasie peut s’associer. On pratique une biopsie exérèse totale. Il est logique d’y associer une autogreffe de limbe.