Vous recevez au SAU Mme R., 67 ans, pour dyspnée depuis 24 heures. Elle est obèse (IMC = 31 kg/m2), traitée pour une HTA et bien équilibrée. Elle a comme antécédents chirurgicaux une cholécystectomie et trois accouchements par voie basse. Elle est retraitée, après avoir été femme de ménage depuis ses 18 ans.  Elle n’a jamais fumé et ne consomme pas d’alcool. Elle n’a pas voyagé récemment. Elle se sent inhabituellement fatiguée depuis 3 mois avec perte de 6 kg, mais la dyspnée a débuté la veille.

Constantes à l’arrivée : FC = 98 bpm, TA = 151/87 mmHg, apyrétique, saturation = 92 %. Pas de douleur thoracique, pas de palpitation, pas d’autre gêne en dehors de la dyspnée. L’auscultation cardiopulmonaire ne montre pas d’anomalie. Il n’y a pas de signe d’hypoperfusion périphérique.
Question 1 - Devant ce tableau, vous demandez (une ou plusieurs réponses exactes) :
Pas de douleur du membre inférieur, pas d’œdème.
Bilan de dyspnée.
Cf. calcul de la probabilité clinique.
Pas d’étiologie à la dyspnée actuellement.
Cf. calcul de la probabilité clinique.
Calcul de la probabilité selon le score de Genève :
67 ans + 1 point
Pouls 98 + 2 points
     => 3 : probabilité clinique intermédiaire. Il existe donc une indication à réaliser un dosage de D-Dimères avant d’effectuer un angioscanner

Score révisé de Genève
Âge > 65 ans : 1
ATCD TVP ou EP : 1
Chirurgie ou fracture dans le mois : 1
Néoplasie active : 1
Hémoptysie : 1
Douleur Unilatérale MI
Pouls 75-94 bpm : 1
Pouls ≥ 95 : 2
Douleur à la palpation du membre inférieur et œdème unilatéral : 1
Faible < 10 % : 0-1
Intermédiaire 30-40 % : 2-4
Forte > 60 % : ≥ 5
Le bilan sanguin retrouve une créatininémie à 100 µmol/L (DFG = 60 ml/min, contre 60 µmol/L l’année précédente). La bandelette urinaire montre : leucocytes +, nitrites –, protéines –, sang ++. Vous faites finalement réaliser un angioscanner thoracique qui retrouve une embolie pulmonaire bilatérale.
Question 2 - Vous réalisez comme bilan étiologique de cette embolie pulmonaire (une ou plusieurs réponses exactes) :
Car altération de l’état général, hématurie et apparition d’insuffisance rénale.
Il ne s’agit pas d’un marqueur diagnostique.
Inutile après 40 ans en cas de premier épisode.
Mise à jour des dépistages.
Altération de l’état général et hématurie sont des points d’appel à investiguer.
Voici le résultat du TDM abdomino-pelvien que vous avez demandé :
Figure 1 (Source : Gabrielle Tissot, La Revue du Praticien)
Question 3 - Devant ce scanner, vous pouvez supposer que (une ou plusieurs réponses exactes) :
Les plaques artérielles ne sont pas responsables d’embolie pulmonaire.
Un cancer est pro-thrombogène et il existe un thrombus de la veine cave inférieure.
Il s’agit du rein gauche.
Au scanner, il est très difficile de faire la différence entre une thrombose de proximité et un envahissement veineux de la tumeur.
Le rein et les vaisseaux sont très remaniés ce qui n’est pas le cas dans une pyélonéphrite.
Le tableau de tumeur rénale avec thrombus de la veine rénale explique à la fois le tableau d’insuffisance rénale avec hématurie et l’embolie pulmonaire qui est un mode de découverte fréquent de ce type de tumeur.
Figure 2 (Source : Gabrielle Tissot, La Revue du Praticien)

1. Veine cave inférieure avec thrombus.
2. Rein gauche.
3. Veine rénale thrombosée.
4. Foie d’aspect normal.
Après relecture complète du scanner, vous concluez à une tumeur du rein localisée avec un thrombus cave inférieur. La patiente est hospitalisée en service d’urologie.
Question 4 - Vous décidez de compléter le bilan d’extension et demandez (une ou plusieurs réponses exactes) :
Permet de mieux évaluer les limites du thrombus qu’au scanner, elle n’est pas systématique en l’absence de thrombus associé à la tumeur.
Les échographies rénales peuvent être utiles dans les tumeurs kystiques (échographie de contraste) mais pas dans les tumeurs rénales.
Pas toujours : certaines tumeurs peuvent être surveillées ou être traitées par des techniques mini-invasives (micro-onde, cryothérapie).
Cf. commentaire.
Pour éliminer des localisations métastatiques qui peuvent contre-indiquer la chirurgie première.
Dans les tumeurs du rein de plus de 2 cm, la stratégie est généralement la chirurgie, sauf si le patient est trop fragile pour la supporter ou risque la dialyse en cas d’ablation. Il est important d’éliminer une localisation tumorale à distance, car en cas de métastase une immunothérapie première peut être indiquée.
Indications de la biopsie rénale :
- Forme atypique à l’imagerie (dommage de faire une néphrectomie pour un lymphome…) ;
- Forme métastatique ;
- Si projet de thermoablation ;
- Hésitation sur rupture de surveillance/patient non éligible pour la chirurgie.
La tumeur de la patiente est éligible à une chirurgie première.
Question 5 - Parmi les éléments de son dossier, lesquels doivent être pris en compte pour évaluer la complexité chirurgicale (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Peut créer des adhérences intra-abdominales.
Pas d’incidence chirurgicale si bien contrôlée.
Elle a accouché par voie basse.
La graisse intra-abdominale et sous-cutanée complexifie la dissection.
Question de bon sens : les différents points ne sont pas toujours abordés les yeux rivés sur le collège, surtout en chirurgie…
Les limites à la chirurgie :
- Les contre-indications à l’anesthésie générale ;
- Les antécédents chirurgicaux et infections dans la même zone : les adhérences cicatricielles intra-abdominales modifient l’anatomie ;
- La corpulence du patient : la longueur des instruments n’est pas toujours suffisante, le tissu adipeux rend les organes moins reconnaissables ;
- La dénutrition : facteur majeur de problème de cicatrisation.
Chez cette patiente, l’anticoagulation péri-opératoire nécessitera probablement une prise en charge en soins continus en postopératoire.
Vous opérez la patiente avec brio d’une néphrectomie et thrombectomie cave. Bilan à J1 : hémoglobine = 8,7 g/dL, plaquettes = 660 G/L, leucocytes = 18 G/L, CRP = 57 mg/L, créatinine = 190 µmol/L.
Pour rappel, le bilan réalisé avant la chirurgie montrait : hémoglobine = 11 g/dL, plaquettes = 330 G/L, leucocytes = 7 G/L, CRP = 4 mg/L, créatinine = 110 µmol/L.
À l’examen clinique, la patiente est algique au niveau de la cicatrice. Celle-ci est propre, il n’y a pas d’écoulement. Le redon donne 100 cc d’un liquide séro-hématique. La patiente est apyrétique, la pression artérielle est à 110/90 mmHg et la fréquence cardiaque à 95 battements/min.
Question 6 - Devant ce bilan, vous prescrivez (une ou plusieurs réponses exactes) :
La créatinine s’élève toujours après néphrectomie, puis redescend progressivement avec l’adaptation du rein contro-latéral.
Cette patiente est à haut risque thrombogène et vous n’avez pas son hémoglobine de base pour affirmer la déglobulisation.
Pour contrôler la décroissance de la créatinine et une éventuelle déglobulisation.
Le syndrome inflammatoire est secondaire à la chirurgie en elle-même en postopératoire immédiat, et ne permet pas d’affirmer une infection surajoutée.
Pas de critère transfusionnel.
Le bilan postopératoire est modifié par la chirurgie :
– Syndrome inflammatoire important, qui ne témoigne pas d’une infection à traiter systématiquement
     => Les situations d’infections postopératoires diagnostiquées cliniquement : fièvre, réascension des douleurs, écoulement des cicatrices
     => Toujours prendre en compte les prélèvements per-opératoires.
– Les marqueurs des organes manipulés pendant la chirurgie augmentent
     => Rein : créatinine, foie : ASAT, ALAT, etc.
– Il existe souvent une déglobulisation postopératoire
     => À confronter aux pertes sanguines per-opératoire : suites chirurgicales ou saignement actif ?
Vous revoyez la patiente plusieurs années plus tard, son cancer est en rémission mais son hypertension est déséquilibrée et se complique d’une néphropathie hypertensive. Elle s’approche de la dialyse et est également candidate à une transplantation rénale préemptive. Vous la voyez dans le cadre du bilan pré-greffe.
Question 7 - Vous évaluez la faisabilité de la greffe en fosse iliaque droite avec anastomose uérétérovésicale. Dans ce cadre, quels éléments doivent être pris en compte (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Les greffons s’implantent essentiellement sur l’artère iliaque (en l’absence d’anomalie anatomique dans le cas d’une première greffe).
L’anastomose entre l’uretère du greffon et la vessie du receveur peut être difficile à réaliser si le receveur est anurique depuis longtemps car sa vessie sera très atrophiée. Dans ce cas-là, il peut être nécessaire de faire une anastomose pyélo-urétérale.
L’implantation d’un premier greffon se fait en extra-péritonéal en fosse iliaque.
Toujours réévaluer l’état nutritionnel et l’adiposité abdominale, les patients obèses ont plus de difficultés techniques. L’état nutritionnel est prédictif de la cicatrisation en post opératoire.
Même si la grossesse ne modifie pas l’anatomie de la zone qui recevra le greffon, elle modifie le profil immunologique de la receveuse car elle majore le risque d’allo-immunisation.

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