Vous voyez aux urgences Mme H., 70 ans, pour céphalées. Elle est suivie pour une hypertension artérielle traitée par amlodipine, et a eu une fracture du col fémoral à la suite d’une chute de sa hauteur il y a cinq ans. Elle est adressée par son médecin traitant, car elle se plaint de céphalées frontales depuis environ un mois, à prédominance matinale et progressivement croissantes. Elle se sent également inhabituellement fatiguée.
Question 1 - Les diagnostics suivants sont compatibles avec le tableau clinique présenté :
Les céphalées sont généralement brutales et intenses.
Les céphalées sont rarement chroniques sur un mois mais plutôt par crises avec caractéristiques migraineuses.
Il s’agit de céphalées matinales d’évolution progressive depuis un mois devant faire évoquer une hypertension intracrânienne et toutes ses causes (y compris une thrombose veineuse cérébrale), une méningite chronique, une hypertension artérielle incontrôlée, ou une artérite a cellules géantes.
Question 2 - La (les) proposition(s) suivante(s) est (sont) exacte(s) :
Ou bien une méningite chronique.
Ou un autre processus expansif intracrânien.
Il existe généralement une HTA secondaire en cas d’hémorragie méningée.
L’aura ophtalmique est généralement binoculaire, et de type scotome scintillant sans véritable BAV.
Plus précisément vers une artérite a cellules géantes.
Vous retrouvez une température à 37,6 °C, une fréquence cardiaque à 85/m, une pression artérielle à 139/85 mmHg. Vous ne retrouvez pas d’anomalie à l’examen clinique, en particulier neurologique. La patiente n’a pas de nausées ni de vomissements.
Question 3 - Parmi les propositions suivantes, quels examens complémentaires demandez-vous dans l’immédiat ?
Dans l’hypothèse d’une artérite a cellules géantes.
L’imagerie cérébrale devra être réalisée avant une éventuelle PL (il ne s’agit pas d’un tableau de méningite).
Pas d’élément en faveur d’une connectivite.
Pas d’élément en faveur d’une vascularite associée aux anticorps ANCA.
Un scanner cérébral est réalisé (figures 1A et 1B).
Figure 1A (source : É. Crickx)
Figure 1B (source : É. Crickx)

 

Question 4 - Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont exactes ?
Le scanner cérébral est sans particularité.
Le bilan biologique retrouve : globules blancs (GB) : 11 000/mm3 ; hémoglobine (Hb) : 12 g/dl, plaquettes : 570 000/mm3, CRP : 85 mg/L, ionogramme normal.
En reprenant l’interrogatoire, la patiente vous explique qu’elle a eu également des douleurs des deux épaules et des deux cuisses qui sont apparues en même temps que les céphalées.
Question 5 - Le diagnostic le plus probable pour expliquer l’ensemble des symptômes est le suivant :
L’association de céphalées chroniques, de syndrome inflammatoire inexpliqué, et de douleurs rhizoméliques chez une patiente de plus de 50 ans fait évoquer une artérite a cellules géantes en premier lieu, d’autant que le scanner cérébral est normal.
Vous suspectez une vascularite. Un scanner thoracique injecté est réalisé (figure 2).
Figure 2 (source : É. Crickx)
Question 6 - La (les) proposition(s) suivante(s) est (sont) exacte(s) :
On note un épaississement circonférenciel homogène des parois de l’aorte thoracique ascendante et descendante (figure 2B) ainsi que des troncs supra-aortiques (figure 2A).
Voici la correction :
Figure 2 - correction (source : É. Crickx)
Vous retournez voir la patiente. Durant l’entretien, elle vous décrit l’apparition d’un « voile noir » soudain de l’œil droit. Celui-ci est indolore et blanc.
Question 7 - Parmi les propositions suivantes, lesquelles pourraient expliquer la BAV brutale de la patiente dans ce contexte ?
Rarement responsable de BAV brutale.
La BAV est généralement progressive.
Ne donne pas de BAV.
Dans le cadre d’une artérite à cellules géantes, l’apparition d’une amaurose monoculaire traduit une complication vasculaire ophtalmologique, généralement une neuropathie optique ischémique antérieure aiguë ou plus rarement une occlusion de l’artère centrale de la rétine.
Finalement, la BAV disparaît spontanément en moins d’une minute. Vous suspectez une artérite à cellules géantes (par exemple, maladie de Horton).
Question 8 - La (les) proposition(s) suivante(s) est (sont) exacte(s) :
Il s’agit d’une urgence thérapeutique, car même si les symptômes ont disparu, une amaurose fugace est généralement annonciatrice d’une complication vasculaire définitive. Il faut donc réaliser des bolus de solumédrol en urgence. Par ailleurs, la confirmation histologique n’est pas indispensable dans ce cas, car la clinique est très évocatrice et que l’imagerie a déjà confirmé la vascularite des gros vaisseaux.
Cf. Haute Autorité de santé, Protocole national de diagnostic et de soins. Artérite à cellules géantes (Horton). 2017 (révision avril 2020).
Vous prescrivez des bolus de méthylprednisolone, relayés par une corticothérapie orale à fortes doses. La patiente n’a pas d’antécédent personnel ou familial de diabète.
Question 9 - La (les) proposition(s) suivante(s) est (sont) exacte(s) :
Ici, il faudra dépister un diabète cortico-induit, car il y a prescription de fortes doses de corticoïdes (et qui seront pris au long cours). L’élévation des glycémies suit schématiquement la pharmacocinétique des corticoïdes, c’est-à-dire qu’elles augmentent après la prise du matin pour être au maximum dans la journée puis se normalisent dans la nuit. Ainsi, les glycémies à jeun du matin peuvent rester longtemps normales, alors que les premières glycémies anormales sont post-prandiales et permettent un dépistage plus sensible. L’HbA1C est le reflet des glycémies sur les trois derniers mois et n’est donc pas utile ici.
Vous décidez la mise en place d’une corticothérapie prolongée, initialement à fortes doses.
Question 10 - Parmi les propositions suivantes, lesquelles prescrivez-vous en prévention de l’ostéoporose cortico-induite chez cette patiente ?
Oui, car corticothérapie au long cours (> 7,5 mg/j pour plus de 3 mois).
Oui, car corticothérapie au long cours (> 7,5 mg/j pour plus de 3 mois).
Oui, car corticothérapie au long cours (> 7,5 mg/j pour plus de 3 mois), chez une patiente ménopausée avec antécédent de fracture du col. La mesure de la densité minérale osseuse est donc peu utile dans ce contexte.
Oui, car participe à la fois à la prévention de l’ostéoporose, de l’amyotrophie cortico-induite et de la prise de poids.
La patiente n’a jamais vécu en zone d’endémie parasitaire, en dehors de plusieurs voyages en Afrique subsaharienne lorsqu’elle avait 40 ans.
Question 11 - Parmi les propositions suivantes, laquelle prescrivez-vous en prévention de l’anguillulose maligne chez cette patiente ?
L’examen parasitologique des selles a une mauvaise sensibilité pour détecter l’anguillule en dehors d’une infection aiguë (il faut réaliser la technique de Baermann). Il n’est donc pas recommandé dans ce cas.
L’anguillule ne se retrouve pas dans les urines.
La sérologie n’est pas fiable pour le diagnostic d’anguillulose.
Le déparasitage avant corticothérapie à fortes doses doit être systématique à partir du moment où la patiente a voyagé en zone d’endémie parasitaire, car une infestation peut persister durant plusieurs années et se réactiver lors de la corticothérapie.
L’évolution est initialement favorable dès la mise en route de la corticothérapie sur tous les symptômes. Quelques mois plus tard, alors que vous avez débuté la décroissance de la corticothérapie (dose quotidienne de 20 mg de prednisone), la patiente vous recontacte car le résultat de sa prise de sang montre une CRP à 35 mg/L, alors qu’elle était normale 15 jours avant. Elle se plaint de fatigue, sans autre symptôme, notamment pas de fièvre.
Question 12 - Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont exactes ?
Non, car bonne réponse initialement aux corticoïdes.
Oui, car récidive de symptômes à la décroissance de la corticothérapie.
Oui, la rechute peut initialement uniquement se manifester par un syndrome inflammatoire biologique.
Oui, toujours se méfier d’une autre cause de syndrome inflammatoire.
Vous réaugmentez la dose de corticothérapie, ce qui permet une normalisation de la CRP. La patiente vous reconsulte un mois plus tard pour une toux associée à de la fièvre, avec quelques crépitants en base gauche. Le bilan biologique montre des leucocytes à 18 000/mm3 à prédominance de polynucléaires neutrophiles, et une CRP à 40 mg/L. La radiographie thoracique est jointe (figure 3).
Figure 3 (source : É. Crickx)

 

Question 13 - La (les) propositions suivantes est (sont) exacte(s) :
Ici, le tableau clinique et radiologique est celui d’une pneumopathie de la base gauche.
Vous diagnostiquez une pneumopathie franche lobaire aiguë sans signe de gravité.
Question 14 - À propos de la corticothérapie dans ce contexte infectieux, la (les) proposition(s) suivante(s) est (sont) exacte(s) :
À éviter, car risque d’insuffisance surrénalienne (et de rechute de la vascularite).
À éviter, car risque d’insuffisance surrénalienne (et de rechute de la vascularite).
Inutile, car pas de signe de rechute, et dangereux dans un contexte de pneumopathie.
L’arrêt de la prednisone doit être évité, car il existe un risque important de rechute de la vascularite. L’hydrocortisone n’a pas d’activité anti-inflammatoire et le risque de rechute est également présent. Il faut donc poursuivre le traitement à l’identique.
Elle vous demande si une vaccination aurait pu éviter cet épisode.
Question 15 - Parmi les propositions suivantes, lesquelles auraient dû être prescrites dès le début de la corticothérapie ?
Non indiquée, et par ailleurs contre-indiquée car vaccin vivant (patiente immunodéprimée).
Contre-indiquée car vaccin vivant (patiente immunodéprimée).
Ce schéma est à privilégier chez les patients immunodéprimés.
Même si la corticothérapie va limiter l’efficacité vaccinale, les vaccins restent indiqués pour prévenir le risque infectieux. Les vaccins vivants sont contre-indiqués en cas d’immunosuppression.

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