Vous recevez en consultation M. X., 67 ans, que vous suivez en ville pour une hypertension artérielle, une dyslipidémie, et qui a eu un antécédent de prostatite aiguë il y a 4 ans.

Il est actuellement traité par ramipril, hydrochlorothiazide et simvastatine. 

Il s’agit d’un ancien journaliste à la retraite, non fumeur, consommant de l’alcool occasionnellement, en surpoids (86 kg pour 1,72 m). Il n’a pas d’antécédent familial de cancer. 

Il consulte car il a entendu parler du dépistage du cancer de la prostate et vous interroge à ce sujet. 
Question 1 - Vous lui donnez les informations suivantes concernant le dépistage du cancer de prostate : 
Les seuls facteurs de risque de cancer : âge, antécédent familial de cancer de la prostate, origine afro-antillaise, mutation BRCA.
Il s’agit d’un dépistage individuel. Les seuls dépistages organisés à l’ECN : le cancer du côlon et le cancer du sein. Le cancer du col rentre dans le cadre des dépistages recommandés.
TR + PSA tous les ans chez les hommes de plus de 50 ans.
Le dépistage du cancer de la prostate est un dépistage individualisé et devant donc être discuté avant entre le patient et le soignant. Il existe un risque de surdiagnostic de petits cancers de prostate d’évolution indolente. 
Il repose sur : 
– toucher rectal + PSA sérique ;
– fréquence annuelle ;
– de 50 ans à classiquement 75 ans (minimum 10 ans d’espérance de vie) ;
– peut être proposé de manière plus précoce selon la présence de facteurs de risque.
Votre patient est convaincu de la pertinence du dépistage. 
Il réalise de manière assidue les dosages de PSA et vos TR reviennent normaux. Le patient décide d’arrêter son dépistage et vous le perdez de vue pendant 4 ans. 
Il est finalement pris de remords, et revient en consultation pour reprendre un dépistage. Le PSA est dosé à 24 ng/ml. 
Le reste du bilan biologique est le suivant : 
– Numération formule sanguine (NFS) : hémoglobine (Hb) = 13,1 g/dL ; leucocytes = 6 500/mm3 ; polynucléaires neutrophiles (PNN) = 2 100/mm3 ; plaquettes (Pl) = 176 000/mm3 ;
– ionogramme sanguin : créatinine = 107 µmol/L, ionogramme sans particularité ;
– bilan hépatique sans particularité ;
– lactate déshydrogénase (LDH) = 265 UI/L (N < 244 UI/L) ; albumine = 42 g/L ; protéine C réactive (CRP) = 7,2 mg/L. 
Le toucher rectal retrouve un nodule pierreux envahissant l’intégralité du lobe droit, sans rupture capsulaire.
Le reste de l’examen clinique est sans particularité. 
Question 2 - Vous organisez les éléments suivants :
Une élévation du LDH est un signe de lyse cellulaire (ici probable cancer de la prostate) et n’est pas du tout spécifique de cancer du testicule.
Il faut poser le diagnostic de cancer avant de faire un bilan d’extension.
L’IRM pelvienne est maintenant recommandée par l’Association française d’urologie (AFU) dès qu’une biopsie est indiquée : classiquement PSA > 4 ng/mL ou anomalie du toucher rectal. Elle peut permettre de guider la biopsie.
Il s’agit du bilan d’extension. Pour le moment, le diagnostic de cancer n’est pas posé.
La priorité ici est de réaliser le diagnostic histologique, qu’on réalisera à l’aide de biopsies transrectales, guidées par les résultats éventuels de l’IRM.
L’IRM prostatique retrouve un nodule PIRADS 5 de 4 cm du lobe droit, avec une atteinte du lobe gauche par contiguïté, mais sans rupture capsulaire. Pas d’atteinte ganglionnaire. 
Vous avez réalisé les biopsies prostatiques transrectales à l’aveugle et ciblées à droite. 
Celles-ci confirment le diagnostic d’adénocarcinome prostatique (6/6 biopsies à droite, 2/6 à gauche), Gleason 7 (4+3) sans extension périnerveuse ni embole vasculaire visible.
Question 3 - Le grade de l’International Society of Urological Pathology (ISUP) du patient est le suivant :
Le grade ISUP s’est imposé comme la référence dans la classification des cancers de la prostate et est à connaître. Il est construit ainsi : 
– ISUP 1 = Gleason 6 ;
– ISUP 2 = Gleason 7 (3+4, donc le contingent Gleason 3 est majoritaire) ;
– ISUP 3 = Gleason 7 (4+3, donc le contingent Gleason 4 est majoritaire) ;
– ISUP 4 = Gleason 8 ;
– ISUP 5 = Gleason 9-10.
Question 4 - Vous organisez le bilan d’extension suivant : 
Déjà réalisée.
Pas de fixation des cancers de la prostate au 18-FDG.
Pas encore de place en routine ni en bilan d’extension.
Petit mémo concernant les différents risques de cancer de prostate localisés, leur bilan d’extension et leurs options thérapeutiques respectives. Ici, il s’agissait d’un cancer de prostate T3a (envahit les deux lobes), avec un PSA à 24 ng/mL et un Gleason 7 (4 + 3). Donc il s’agit d’une forme à haut risque.
Source : D’Amico AV, Whittington R, Malkowicz SB, et al. Biochemical outcome after radical prostatectomy, external beam radiation therapy, or interstitial radiation therapy for clinically localized prostate cancer. JAMA 1998;280(11):969-74. 
Vous avez fait réaliser un scanner thoraco-abdomino-pelvie qui revient normal, ainsi qu’une scintigraphie osseuse au technétium 99. Celle-ci montre l’aspect suivant : 
Figure (Matthieu Roulleaux Dugage, La Revue du Praticien)

Vous vous apprêtez à discuter du dossier en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).
Question 5 - Vous proposez la/les prise(s) en charge suivante(s) en RCP :
La scintigraphie osseuse est normale. 
Les modalités thérapeutiques des cancers de la prostate localisés ont été rappelées à la question précédente. Ici, on proposera une radiothérapie prostatique + aires ganglionnaires, associée à une hormonothérapie longue (18-24 mois). Des études récentes suggèrent le bénéfice à ajouter de l’abiratérone en plus. 
La prise en charge chirurgicale de ces formes à haut risque est de moins en moins consensuelle mais peut être discutée. 
Vous proposez au patient une radio-hormonothérapie longue : 24 mois d’hormonothérapie associés à une radiothérapie qui délivrera 70 Gy en 35 fractions de 2 Gy. 
Question 6 - Ce traitement peut comporter :
L’abiratérone est un inhibiteur du CYP17, et sa place dans le cancer de prostate localisé n’est pas complètement codifiée.
Notamment à l’initiation d’un analogue de la LH-RH.
Le tamoxifène est un inhibiteur du récepteur aux œstrogènes, et il est utilisé dans le cancer du sein.
Plusieurs modalités d’hormonothérapie sont possibles, qui visent à bloquer la pulsatilité de la sécrétion de LH-RH par l’hypothalamus, et ainsi indirectement à bloquer la synthèse de testostérone (dont les cellules tumorales ont besoin pour croître) : 
– analogues de la LH-RH : mais s’accompagnent au début d’un pic de testostérone (puis internalisation des récepteurs à la LH-RH), responsable d’un effet protumoral (c’est l’effet « flare-up »). Il faut donc lui associer un anti-androgène à son initiation ;
– antagonistes de la LH-RH ;
– pulpectomie (rarissime).
Le malade écoute vos explications et les modalités thérapeutiques que vous lui décrivez. Néanmoins, il vous interroge sur les effets indésirables d’un tel traitement, alors qu’il avait entendu parler de chirurgie sur Internet. 
Question 7 - La radio-hormonothérapie peut être responsable de :
La cystite radique (au contact de la prostate) peut se manifester par des urgenturies, des hématuries.
En revanche, la radiothérapie est classiquement responsable d’une lymphopénie.
Effets indésirables classiquement associés à l’hormonothérapie : 
– bouffées de chaleur, 
– baisse de la libido, 
– dysfonction érectile, 
– ostéoporose, 
– prise de poids, 
– dyslipidémie et surrisque cardiovasculaire…
La radiothérapie peut être responsable d’une inflammation des organes de voisinage (rectite, cystite radique, mais également dermite radique…).

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