Un patient de 68 ans, aux antécédents d’hypertension artérielle sous Amlodipine et d’un syndrome dépressif chronique non traité, a des palpitations intermittentes.

Ceci l’inquiète beaucoup, raison pour laquelle il vient consulter. Il ne décrit aucune symptomatologie lors de la prise de l’ECG.
Quels éléments sont à rechercher à l’interrogatoire pour mieux caractériser les palpitations ?
Le mode de survenue brutal (évocateur de cause cardiaque rythmique) ou progressif, leur durée, leur fréquence, les signes de gravité (lipothymie/syncope, angor, dyspnée lors des palpitations).
Le patient décrit ses palpitations comme survenant de manière brutale tous les 3 jours, durant plusieurs secondes. Il ne présente pas d’autres symptômes que ces palpitations.
L’électrocardiogramme que vous réalisez est le suivant :
Comment interprétez-vous son ECG ?
Rythme sinusal, bloc de branche gauche complet (≥ 120ms).
Présence d’extrasystoles ventriculaires monomorphes (QRS larges et différents des QRS conduits) à retard droit donc provenant probablement du ventricule gauche (QRS négatifs en D1-AvL et positifs en V1), et à axe supérieur (provenant du plancher du ventricule). Présence d’un doublet ventriculaire.
Pouvez-vous imputer les palpitations à ces extrasystoles ?
Le patient n'ayant pas de palpitations pendant l’enregistrement, on ne peut pas imputer les palpitations à ces extrasystoles et il faut poursuivre les investigations diagnostiques.
Décidez-vous de poursuivre les investigations cardiologiques, ou adressez-vous le patient à un psychiatre en supposant des palpitations d’origine psychosomatique, compte tenu de son antécédent de dépression ?
L’ECG est pathologique avec :
– un bloc de branche gauche, signe d’une potentielle cardiopathie sous-jacente ;
– des extrasystoles ventriculaires.
Chez ce patient ayant des facteurs de risque cardiovasculaire, un trouble du rythme ventriculaire sur un cœur pathologique doit être évoqué.
Il ne faut pas conclure à des palpitations psychosomatiques sous prétexte que le patient présente un antécédent de dépression ; cela doit rester un diagnostic d’élimination.
Quels examens demandez-vous ?
Une échographie cardiaque trans-thoracique à la recherche d’une cardiopathie sous-jacente, et un Holter-ECG de 48 heures pour objectiver le trouble du rythme.
L’échographie cardiaque retrouve une FEVG à 45 % avec troubles de la cinétique en antéro-latéral. Vous posez un Holter-ECG de 48 heures.
Dès le lendemain, il revient vous voir car il a eu à nouveau des palpitations avec cette fois-ci une sensation de lipothymie.
Vous analysez l’enregistrement du Holter qui retrouve au moment des palpitations une tachycardie ventriculaire non soutenue à 220/min de 15 secondes.
Quelle est votre conduite à tenir ?
Le patient a une tachycardie ventriculaire non soutenue (<30 secondes) avec signes de gravité (lipothymie). Il faut alors adresser immédiatement le patient dans un service de cardiologie pour bilan de cette tachycardie ventriculaire avec notamment exploration coronaire, IRM cardiaque, et prise en charge rythmologique.

 

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