Mme G., patiente de 28 ans, consulte aux urgences générales pour douleurs abdominales. Elle vous explique que ces douleurs sont survenues il y a deux jours, qu’elles sont localisées en région pelvienne et irradient en fosse lombaire bilatérale et dans l’anus. Elle n’a pas eu de vomissement ou de diarrhée.

Elle n’a pas d’antécédent chirurgical ou médical notable à part un herpès génital récent traité ( 6 mois) et deux infections urinaires depuis le début de l’année. Elle est G1P1. Elle n’a pas d’allergie et aucun traitement au long cours, ni de contraception.

Ses constantes à l’arrivée sont : température = 36 °C ; pression artérielle = 118/70 mmHg ; fréquence cardiaque = 85 bpm ; saturation en oxygène = 99 % en air ambiant.

À l’examen, vous trouvez un abdomen sensible en fosse iliaque droite et gauche sans défense associée. Pas de psoïtis. Signe de Giordano négatif. Pas de métrorragie, pas de leucorrhées. Pas de signe fonctionnel urinaire.
Question 1 - Quelle est/sont votre/vos principale(s) hypothèse(s) diagnostique(s) ?
Douleurs abdominales irradiant vers les organes génitaux externes et en fosses lombaires. Apyrexie.
Apyrexie, pas de douleur à la percussion des fosses lombaires (signe de Giordano).
Patiente jeune, douleurs pelviennes évocatrices.
Pas de contraception, patiente en âge de procréer. Il faut toujours y penser.
Douleurs abdominales non sectorisées, le psoïtis est souvent absent.
Question 2 - Quel(s) examen(s) complémentaire(s) paraclinique(s) demandez-vous ?
Éliminer une cystite, une colique néphrétique.
Éliminer une grossesse évolutive.
Bilan inflammatoire indispensable ainsi que la fonction rénale si l’imagerie injectée devient nécessaire.
Pas d’intérêt ici.
Aurait été indispensable en cas de douleur thoracique ou épigastrique.
La bandelette urinaire est négative.
La protéine C réactive (CRP) est à 7,6 mg/L ; les leucocytes sont à 15 G/L ; la créatininémie est à 53 μmol/L avec un débit de filtration glomérulaire (DFG) à 82 mL/min/1,73m². Les bêta-hCG sont négatifs.
L’échographie abdominale ne montre pas de signe en faveur d’une appendicite.
Vous réalisez un examen gynécologique qui retrouve : au toucher vaginal, une douleur à la mobilisation utérine ; à l’examen au spéculum, un col sain, des leucorrhées jaunâtres épaisses.
À l’échographie endovaginale : utérus antéroversé ; endomètre = 7 mm ; ovaire droit et gauche de taille et de morphologie normales. Pas d’épanchement dans le cul-de-sac de Douglas. Pas d’abcès tubo-ovarien.
Question 3 - Quelle conduite à tenir proposez-vous (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Tableau d’infection génitale haute.
Ceftriaxone 1 g par voie intramusculaire (IM) ou IV dose unique pour couvrir le gonocoque.
Doxycycline 500 mg per os et Flagyl 500 mg per os pendant dix jours.
Pour rechercher le germe en cause.
Inutile car le diagnostic est déjà porté, et l’échographie explore mieux le pelvis.
Tableau d’infection génitale haute donc prescription d’antalgiques, antibiothérapie probabiliste (injection de ceftriaxone 1 g IM ou IV en dose unique, puis doxycycline 500 mg per os et Flagyl 500 mg per os pendant dix jours) avec nouvelle consultation à court terme pour évaluer l’efficacité de l’antibiothérapie et la cinétique inflammatoire.
Vous revoyez la patiente en consultation quatre jours après avec les résultats des prélèvements ainsi que sa prise de sang : syndrome inflammatoire en diminution (leucocytes à 6,3 G/L et CRP à 3,3 mg/L) et prélèvement vaginal positif à Chlamydia. Vous aviez prescrit une antibiothérapie probabiliste que vous maintenez pour dix jours au total.
Au cours de l’échange avec la patiente, vous remarquez qu’elle se frotte souvent les mains, qu’elle regarde son téléphone sans arrêt et qu’elle adopte une attitude prostrée. Vous poussez donc l’interrogatoire et lui demandez l’état de son environnement familial, professionnel et social. Elle vous répond succinctement qu’à la maison « tout va très bien », mis à part qu’elle fait beaucoup de cauchemars, qu’elle ne voit plus personne excepté son mari et sa fille, et qu’elle a démissionné de son travail quatre mois auparavant. Elle vous glisse également qu’elle n’arrive pas à avoir de deuxième enfant, que son conjoint aimerait beaucoup agrandir leur famille.
Au cours de la discussion, elle vous dit qu’elle doit rentrer très rapidement chez elle, car son mari l’attend, qu’il l’a appelée plusieurs fois et qu’elle a déjà un retard de 5 minutes. Elle se lève et vous assure qu’elle vous paiera la prochaine fois car elle a oublié le chéquier de son mari à la maison.
Question 4 - Au travers de cet entretien avec la patiente, quel signe de violences conjugales identifiez-vous (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Cauchemar = signe de stress post-traumatique.
« A oublié le chéquier de son mari » = n’a pas de contrôle sur son argent.
Pas retrouvé ici mais signe à dépister.
« Ne voit plus personne », démission récente.
Herpès génital récent (< 6 mois) + infection génitale haute à Chlamydia et infections urinaires répétées.
Pour aller plus loin : HAS. Repérage des femmes victimes de violences au sein du couple. 22 novembre 2022.
Vous décidez de temporiser la situation avec la patiente et l’invitez à se rasseoir calmement pour quelques instants. Dans le but de clarifier ses propos, vous lui posez directement la question : « subissez-vous des violences de la part de votre conjoint ? ». Elle fond en larmes et vous assure qu’avant « il n’était pas du tout comme ça » mais « qu’il va changer, il me l’a promis ».
Question 5 - Afin de caractériser le degré de danger immédiat pour la patiente, quelle question lui posez-vous (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Pour approfondir :  Université numérique en santé et sport (Uness), livret de suivi des apprentissages (LiSA). Savoir quelles situations impose un signalement judiciaire, particulièrement concernant les violences conjugales.
Elle répond négativement à toutes les questions. Vous la laissez repartir de votre cabinet, en lui remettant une brochure contre les violences conjugales et en lui indiquant le numéro 3919 qu’elle peut appeler dès qu’elle le désire, ainsi que le 15 en cas d’urgence.
Elle revient deux semaines plus tard à votre cabinet, très inquiète et accompagnée de sa fille. Elle vous confie être très angoissée ces derniers jours, elle ne dort plus du tout et aimerait « un médicament pour dormir ». Vous prenez le temps de l’interroger et vous passez ensuite à l’examen.
Vous constatez ceci sur le membre supérieur droit (fig. 1 et 2). Elle vous précise ne pas avoir de déficit sensitif.
Figures 1 et 2 (Source : Salomé Oranger, La Revue du Praticien)
Question 6 - Vous rédigez un certificat médical initial, quelle information y inscrivez-vous (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Bien relater les faits de la patiente au temps conditionnel et ne pas apporter de jugement en précisant toujours « elle rapporte/relate/signale… ».
L’ITT dans le code pénal est la durée pendant laquelle la victime est dans l’incapacité de se livrer à un travail quelconque même domestique et d’accomplir les gestes élémentaires de la vie quotidienne (manger, dormir, se laver, s’habiller, faire des courses, se déplacer) –> physique ou psychique.
–> estimée « sous réserve de complication ».
À différencier de l’ITT (incapacité temporaire de travail) en droit civil = arrêt de travail.
Phlyctènes à fond rose, pas de lésion blanchâtre ni de déficit sensitif, donc il s’agit bien d’une brûlure du 2e degré superficiel avec trois autres brûlures du 1er degré.
Bien préciser le côté de la lésion.
Attention, ce ne sera pas cette formulation si c’est un certificat sur réquisition.
On ne doit pas établir de lien entre les faits relatés par la patiente et les blessures physiques ou psychiques constatées.
On se doit de rédiger la description précise et objective des faits médicaux constatés ou la retranscription des faits allégués par le patient au conditionnel.
Description des lésions : symptômes signalés, lésions retrouvées, retentissement fonctionnel, antécédents médicaux susceptibles d’être aggravés par les blessures, résultats des examens complémentaires, traitements prescrits (tout en mettant le tout entre guillemets et au conditionnel).
Vous rédigez le certificat médical initial et vous fixez l’ITT au sens du code pénal.
Pendant l’interrogatoire, la patiente vous informe qu’au cours d’une altercation avec son conjoint il l’a brûlée au niveau du bras et qu’il a failli frapper sa fille. Il l’a menacée de mort si elle quittait le foyer avec leur fille. Elle s’est alors enfuie du domicile dans la nuit et s’est réfugiée chez sa mère.
Vous examinez également sa fille. Elle n’a aucune trace physique d’agression.
Elle n’est pas encore allée porter plainte au commissariat et hésite à le faire car elle l’aime encore et pense qu’il va pouvoir changer.
Question 7 - Au vu de la situation, quelle mesure prenez-vous immédiatement (une ou plusieurs réponses exactes) ?
Cela mettrait en danger la patiente et sa fille une nouvelle fois.
Voir le commentaire général.
Situation de danger « hors urgence ». Mettre également en place un soutien psychologique.
Si maltraitance avérée –> signalement au procureur de la République.
Pour l’instant, pas de risque immédiat donc pas de signalement.
Même en cas de refus de la patiente, il faut faire le signalement car elle est en danger immédiat et sous emprise du conjoint.
La loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales a permis de modifier l’article 226-14 du code pénal et permet au médecin de réaliser un signalement judiciaire pour une victime majeure de violences conjugales lorsqu’il estime en conscience que : les violences mettent la vie de la victime en danger immédiat et que celle-ci n’est pas en mesure de se protéger en raison de la contrainte morale résultant de l’emprise exercée par l’auteur. Le médecin doit s’efforcer d’obtenir l’accord de la victime majeure et, en cas d’impossibilité, doit l’informer du signalement. Ce signalement est à transmettre en urgence au procureur de la République.
Pour approfondir :  Uness, livret LiSA. Savoir quelles situations impose un signalement judiciaire, particulièrement concernant les violences conjugales.

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