Un jeune garçon de 13 ans est amené en consultation par ses parents car il présente depuis un mois une douleur du genou droit le gênant à la marche. Cette douleur est survenue initialement au lever, mais il n’y a pas eu de traumatisme particulier ; elle a été initialement soulagée par du paracétamol mais devient maintenant résistante à ce traitement. Ce garçon n’a pas d’antécédent médical noté dans le carnet de santé. Ses vaccinations sont à jour. Ce garçon pèse 65 kg pour une taille de 165 cm. À la marche, son membre inférieur droit a une attitude en discret flessum de hanche et rotation externe de tout le membre inférieur. Les deux genoux sont secs et stables ; leur palpation ne retrouve pas de point douloureux. La mobilité du genou droit est normale. Vous notez la mobilité des deux hanches :

 
Question 1 : Le diagnostic à privilégier est :
Il n’y a pas de notion de fièvre ni de porte d’entrée ; par ailleurs, l’examen clinique ne retrouve pas d’épanchement articulaire et la mobilité du genou est normale. Il semblerait que l’atteinte ne soit pas située au niveau du genou droit
Dans le rhume de hanche, la douleur survient volontiers au réveil ; la hanche présente une limitation de l’abduction et de la rotation interne.
Cependant, ce diagnostic n’est pas évoqué ici du fait de l’âge du jeune garçon. La SAT (ou rhume de hanche) touche l’enfant de 3 à 10 ans
L’arthrite juvénile idiopathique touche la hanche surtout dans le cadre des spondylarthropathies.
Ici, il n’y a visiblement pas d’atteinte de l’axe central, ni d’argument en faveur d’une pathologie inflammatoire
Il n’y a pas d’argument en faveur d’une sciatique, avec une absence de douleur à la palpation du rachis et un examen neurologique normal
Tout oriente vers une épiphysiololyse de la hanche :
– la douleur chronique, localisée au genou avec toutefois un examen clinique du genou normal
– la position vicieuse du membre inférieur en rotation externe
– la limitation de la mobilité de la hanche, principalement en abduction et rotation interne
– le patient est un jeune homme en période pubertaire, avec un surpoids
Question 2 : Ce patient présente des facteurs de risque renforçant votre hypothèse diagnostique :
L’épiphysiolyse de hanche touche principalement les garçons (deux tiers des cas)
Elle touche le garçon en période péri-pubertaire
Les modifications hormonales du surpoids et la charge mécanique pourraient expliquer la survenue de cette pathologie
Question 3 : Certains examens complémentaires sont indispensables au diagnostic : Lesquels ?
L’échographie n’apporterait aucune information pertinente dans ce contexte mécanique
De face et de profil de Lowenstein des deux hanches
La scintigraphie n’a pas d’indication dans le diagnostic initial de l’épiphysiolyse de hanche
Question 4 : L’élément radiologique du compte-rendu du radiologue qui vous fera retenir le diagnostic d’épiphysiolyse est :
L’épiphyse est au contraire plus basse du côté pathologique
Au contraire, elle ne coupe plus le noyau céphalique de la hanche pathologique. La ligne de Klein est la tangente au bord supérieur du col fémoral
On retrouve cette anomalie dans l’ostéochondrite primitive de la hanche
Question 5 : Le paracétamol ne semble plus efficace chez ce patient. Que proposez-vous à visée antalgique ?
Le glaçage n’a pas d’intérêt dans une atteinte mécanique chronique
La posologie du paracétamol ne doit pas dépasser 1 g par prise toutes les 6 heures chez ce patient. La posologie maximale est de 60 mg/kg/j, maximum 4 g par jour
Un palier I ne suffisant pas, il est nécessaire de passer à un palier II
Nous n’avons ici aucune indication sur l’intensité de la douleur qui, seule, pourrait nous faire opter pour un morphinique directement, sans l’administration d’un palier II
La traction sur les membres inférieurs a un intérêt uniquement antalgique dans ce cadre-là
Question 6 : Quel traitement étiologique proposez-vous au niveau de la hanche ?
La traction n’est pas un traitement étiologique, mais symptomatique. Il serait délétère d’ailleurs de provoquer une traction sur une hanche à risque comme celle-ci
Se discute d’ailleurs une prise en charge préventive sur l’autre hanche
Après la prise en charge chirurgicale, votre patient rentre au domicile où il bénéficie de séances de rééducation. Les séances se passent bien ; pourtant, après une semaine, une douleur brutale de la hanche droite survient, majorée à la marche. À l’examen clinique, l’aspect de la hanche est normal mais la palpation est très douloureuse. Il n’y a pas de rougeur, pas d’écoulement. Il n’y a pas de fièvre.
Question 7 : Quelle pathologie redoutez-vous ?
C’est LA complication aiguë de l’épiphysiolyse, survenant le plus souvent suite à la chirurgie
L’arthrose est une des complications les plus importantes de l’épiphysiolyse de hanche. Mais elle est de survenue chronique et non aigue
 Vous réalisez l’examen d’imagerie suivant.
Question 8 : Vous notez :
Il s’agit de la zone en hyposignal située sous la ligne de démarcation de la zone de nécrose
Votre prise en charge optimale permet de soulager le jeune garçon et, finalement, l’épisode aigu rentre dans l’ordre. 
À distance, vous vous intéressez alors à son poids. Pour cela, vous récupérez les courbes suivantes ; il pèse actuellement 65 kg pour 165 cm (indice de masse corporelle [IMC] = 23,9).

 

 

Question 9: Concernant la corpulence de ce jeune garçon, vous affirmez…
L’obésité se définit chez l’enfant à l’aide des courbes d’IMC qui évoluent en fonction de l’âge et sont différentes selon le sexe :
– lorsque l’IMC est supérieur au 97e percentile pour l’âge et le sexe, on parle de surpoids (définition internationale, à privilégier) ou obésité de degré 1 (définition française). La courbe du 97e percentile correspond à un IMC à 25 kg/m² chez l’adulte ;
– lorsque l’IMC est supérieur à la courbe qui correspond à un IMC à 30 kg/m² chez l’adulte, on parle d’obésité (définition internationale) ou obésité de degré 2.
L’examen clinique est parfaitement normal, et vous complétez les courbes précédentes. Vous notez par ailleurs que le père de votre patient est également en surpoids modéré, la mère n’a pas de problème de santé. Les grands-parents paternels ont présenté chacun un infarctus du myocarde vers l’âge de 70 ans.

 

Question 10: Les données suivantes orientent vers le bilan étiologique de ce surpoids, vous proposez donc dans ce contexte…
Le surpoids présenté par ce patient est probablement « commun », non secondaire. En effet, les causes principales d’obésité secondaire sont endocriniennes et s’associent à une stagnation ou à une cassure de la courbe de taille, ce qui n’est pas le cas ici. Les causes génétiques doivent être évoquées en cas d’antécédent familial, de dysmorphie, de cassure de la courbe de taille, de retard pubertaire, de retard mental ou de troubles du comportement. En l’absence de ces points d’appel, il n’y a pas d’indication à réaliser un bilan, hormis une enquête diététique.
Question 11: Quels examens complémentaires prescrivez-vous à la recherche d’une complication de ce surpoids ?
L’obésité est un facteur de risque d’ostéoporose. Cependant, cette complication est tardive. L’antécédent d’épiphysiolyse n’est pas une indication à la réalisation d’une DXA (dual-energy X-ray absiorptiometry)
Le diabète est exceptionnel chez l’enfant obèse. Il est évoqué devant un syndrome polyuro-polydipsique et il n’y a pas d’indication à réaliser de manière systématique des glycémies veineuses, capillaires ou des hyperglycémies provoquées par voie orale (HGPO)
La recherche de cette complication pourtant fréquente n’est pas indiquée du fait de l’absence de modification de la prise en charge en présence de celle-ci.
Le jeune homme vous explique avoir conscience de trop manger, parce qu’il a très vite faim après un repas. Il est motivé, et ses parents également, pour améliorer la situation actuelle.
Question 12: Quels vont être les objectifs de la prise en charge initiale que vous allez mettre en place ?
La déculpabilisation est la première étape dans la prévention des complications psychosociales. Celles-ci sont souvent provoquées par un sentiment de culpabilité ressenti par le patient, alimenté par la culpabilité des parents et les critiques et moqueries de l’entourage (scolaire notamment)
Question 13: Quelle prise en charge mettez-vous donc en place ?
Le patient dit lui-même qu’il mange trop pour son âge. La base du premier régime à prescrire est d’obtenir un régime normocalorique pour l’âge, correspondant déjà à une diminution des ingesta
Il n’y a aucun traitement indiqué dans l’obésité de l’enfant. La caroube présente des effets indésirables importants
La prise en charge chirurgicale chez l’enfant est exceptionnelle ; elle est indiquée uniquement en cas d’obésité sévère avec complication somatique
Vous voyez régulièrement en consultation votre jeune patient. La stabilisation de sa prise de poids est difficile à obtenir. Il vous signale au cours d’une consultation qu’il est de plus en plus fatigué la journée, il a loupé à 5 reprises les cours pour pouvoir rester dormir à la maison. Il se réveille beaucoup la nuit, notamment pour aller uriner. Cette fatigue a un retentissement sur ses résultats scolaires qui sont catastrophiques. Il ne présente aucune autre plainte. Sa mère vous signale alors le remarquer souvent en sueur le matin, quand elle doit aller le réveiller (sans quoi, il resterait dormir toute la journée).
À l’examen clinique, hormis son surpoids, vous ne notez aucune anomalie. Vous réalisez une bandelette urinaire qui retrouve : glucides +, protéines +, cétones +, sang -.
Question 14: Quels éléments sont en défaveur d’une acidocétose diabétique ?
En effet, l’acidocétose se retrouve plutôt et très largement sur les diabétiques de type 1, qui sont au contraire plus maigres que la population générale
L’adolescence est la période de découverte du diabète de type 1 la plus fréquente
Toute nycturie inhabituelle doit faire penser à un diabète de type 1
Elle peut être associée à un diabète de type 1 et notamment une acidocétose
La glycosurie de l’acidocétose diabétique est volontiers > +++ avec une réelle cétonurie > ++
Question 15: Que programmez-vous ?
Il n’y a pas d’indication, la bandelette urinaire (BU) doit être considérée comme non pathologique
Il n’y a pas d’indication, la bandelette urinaire (BU) doit être considérée comme non pathologique
L’examen ORL du syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est indispensable chez l’enfant. Même en cas d’obésité, l’association avec une hypertrophie amygdalienne est importante et le traitement de celle-ci peut permettre une amélioration des conditions de sommeil
C’est l’examen de choix du diagnostic de SAOS

 

Exercez-vous aux ECN avec les dossiers progressifs et les LCA de La Revue du Praticien