Monsieur R., 78 ans, est admis aux urgences pour altération de l’état général et fièvre apparues depuis deux semaines. Son médecin traitant lui a prescrit un traitement par azithromycine pendant 5 jours sans effet sur la fièvre. Il n’a pas d’antécédent particulier hormis des troubles fonctionnels intestinaux et une résection trans-urétrale de prostate pour adénome il y a 10 ans. L’examen clinique révèle une température de 38 °C, un souffle systolique non connu au foyer mitral, un déficit brachio-facial droit et une vision trouble. Les résultats d’un premier bilan biologique sont les suivants : leucocytes 13,7 G/L dont 83 % de polynucléaires neutrophiles, hémoglobine 11,8 g/dL, plaquettes 235 G/L, CRP 193 mg/L, créatininémie 87 µmol/L. Les autres examens de biologie standard sont normaux. Le scanner cérébral montre une hypodensité sylvienne gauche. Deux hémocultures sont positives à Cocci à Gram positif en chaînettes.
Question 1 – Quel diagnostic évoquez-vous ? Justifiez votre réponse.
Endocardite infectieuse subaiguë, communautaire, sur valve mitrale native compliquée d’un accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique sylvien gauche secondaire à de probables emboles septiques :
– infection subaiguë : fièvre et altération de l’état général d’installation progressive sur deux semaines, associées à un syndrome inflammatoire biologique, une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles et une bactériémie à Gram positif ;
– acquisition communautaire (pas de notion de soins ou d’hospitalisation dans les 3 mois) ;
– endocardite infectieuse : apparition d’un souffle systolique mitral dans un contexte d’infection bactériémique ;
– AVC ischémique d’origine embolique : déficit moteur associé à des images évocatrices d’ischémie cérébrale sylvienne dans un contexte de bactériémie.
Question 2 – Quels autres examens complémentaires demandez-vous ?
Les examens complémentaires à prescrire sont les suivants :
– facteur rhumatoïde, protéinurie des 24 heures ;
– électrocardiogramme (ECG) ;
– échocardiographie par voie transthoracique (ETT) ou, préférentiellement, sauf contre-indication, par voie transœsophagienne (ETO) à la recherche d’une image typique d’endocardite (= critère majeur) : végétation, abcès, perforation de valve… ;
– consultation ophtalmologique avec fond d’œil ;
– scanner thoraco-abdomino-pelvien avec injection de contraste ;
– imagerie par résonance magnétique cérébrale.
La réalisation d’un TEP-scanner est possible pour dépister d’éventuels emboles extra-cérébraux et participer à la recherche de la porte d’entrée.
Question 3 – Les hémocultures poussent à Enterococcus faecalis. Quelle(s) porte(s) d’entrée devez-vous rechercher ?
Urinaire et digestive.
Question 4 – Quel traitement proposez-vous ?
Sont proposés :
– une hospitalisation en unité médicale spécialisée (maladies infectieuses, cardiologie) ;
– la présentation du dossier en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) médico-chirurgicale dédiée aux endocardites afin d’évaluer l’indication chirurgicale en fonction de l’état clinique du patient et des paramètres échocardiographiques ;
– une bi-antibiothérapie (amoxicilline et ceftriaxone) par voie intraveineuse pour une durée de 6 semaines. L’association de l’amoxicilline et de la gentamicine est une alternative aussi efficace mais exposant à davantage de néphrotoxicité.
Question 5 – L’évolution est marquée par la survenue d’un œdème aigu du poumon et la persistance d’une fièvre. Quelle est alors votre stratégie thérapeutique ?
La dyspnée peut être le témoin d’une insuffisance cardiaque et la fièvre un signe que l’infection n’est pas contrôlée sous antibiothérapie. Il est impératif d’envisager l’indication chirurgicale urgente même en présence d’un embole ischémique cérébral.

 


Retrouvez l’item lié à ce quiz ici : Camou F, Dijos M. Item 152. Endocardite infectieuse.  Rev Prat 2023;73(1) ;93-101.

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