Vous êtes médecin généraliste en cabinet. Aujourd’hui, vous accueillez Léonie, 19 mois, amenée par son père. Léonie est à la crèche depuis l’âge de 1 an et dernièrement les assistants maternels sont inquiets de son comportement, plus en retrait depuis quelques semaines, « dans sa bulle ». Le père a aussi noté que Léonie semblait avoir des difficultés dans des mouvements quotidiens, qu’elle n’avait pas avant. Par exemple, la marche est plus fastidieuse et elle a besoin de se tenir pour avancer.
Question 1 - Concernant l’examen clinique :
Doit être acquis à 9-12 mois.
Doit être acquis à 3-4 ans.
Doit être acquis à 2-3 ans.
Doit être acquis à 6-9 mois.
Doit être acquis à 5-6 ans.
Les acquisitions correspondent aux performances que l’enfant va progressivement développer dans différents domaines (langage oral, motricité, attention, socialisation, etc.) et qui ne nécessiteront pas de contexte scolaire ou d’enseignements formalisés.
Il existe une variabilité interindividuelle importante du développement de l’enfant, en particulier pendant la période préscolaire (Collège de psychiatrie, 3e édition).
Les signes d’alerte majeurs du trouble du spectre de l’autisme (TSA) sont, quel que soit l’âge :
– inquiétude des parents concernant le développement de leur enfant, notamment en termes de communication sociale et de langage ;
– régression des habiletés langagières ou relationnelles, en l’absence d’anomalie à l’examen neurologique (Haute Autorité de santé [HAS], 2018).
À l’examen clinique, Léonie semble à l’aise et n’a pas peur de vous, mais elle ne vous regarde pas dans les yeux. Elle ne cherche pas non plus son père du regard, ne l’appelle pas. Elle n'a pas de sourire réponse, elle se tourne rarement quand on l’appelle, elle fait peu de demandes à ses parents. Elle peut pointer du doigt pour demander un jouet mais pas pour montrer des nuages à ses parents. Elle boit seule au verre. 
Le père précise que Léonie avait acquis toutes ces facultés et que cela fait plusieurs semaines que progressivement elle ne les réalise plus. 
Les interactions parents-enfants précoces ont été stables et sécurisantes. Elle n’a vécu aucun traumatisme. La séparation lors du début de la crèche s’est faite sans difficultés. Léonie vit avec ses deux parents et son petit frère de 9 mois.
Au domicile comme à la crèche, Léonie est peu intéressée par les autres enfants et n’essaye pas d’aller vers eux. Elle reste souvent seule, isolée, alignant ses jouets sans les utiliser concrètement. 
Léonie a des difficultés d’endormissement et seule la mise en place d’une routine stricte l’aide à s’endormir : deux lectures de l’histoire de Bonsoir Loup par son père, toujours la même comptine et son caillou préféré en doudou. Elle a des difficultés à faire la sieste mais cela s’est amélioré depuis que ses parents font des travaux chez eux : elle s’endort fréquemment en écoutant le bruit de la perceuse. 
Au niveau de l’alimentation, Léonie ne mange que des aliments cuits et ne supporte pas les aliments crus. Elle n’accepte de boire son lait que s’il est toujours dans le même biberon avec la même tétine.
Vous ne retrouvez pas de point d’appel organique lors de votre examen clinique.
Question 2 - Concernant les examens complémentaires de première intention :
Recherche d’une surdité.
Pas de signe d’appel.
Pas de signe d’appel.
Centre expert de 3e ligne. Une orientation vers un spécialiste (pédopsychiatre, neuropédiatre, etc.) est tout de même possible.
Oui, avec rééducation.
Les autres signes d’alerte d’un trouble du neurodéveloppement (TND) avant 18 mois ou d’un TSA à partir de 18 mois sont les suivants :
– avant 18 mois, la persistance de particularités de développement de l’enfant concernant son niveau de vigilance, son sommeil, la diversification alimentaire, la régulation des émotions, le développement de son répertoire moteur, l’exploration inhabituelle des « objets » de l’environnement. Il n’existe à ce jour aucun marqueur pathognomonique d’une évolution vers un TSA avant 18 mois ;
– autour de 18 mois, l’association d’au moins deux signes parmi des difficultés d’engagement relationnel, d’attention, de réciprocité et de réaction sociales (initiation, réponse et maintien de l’attention conjointe, regard adressé, sourire partagé, pointage à distance coordonné avec le regard, réponse au prénom), de langage réceptif et expressif, dans le jeu socio-imitatif et symbolique ou les réponses sensorielles (recherche ou évitement de sensations). Aucun de ces signes pris de façon isolée n’a de valeur prédictive.
Si le risque de TSA est confirmé lors de la consultation dédiée par le médecin assurant le suivi habituel de l’enfant (1re ligne), mettre en place les actions suivantes, en l’attente d’une consultation spécialisée auprès des professionnels de 2e ligne et des résultats de la démarche complète de diagnostic :
– orienter vers un ORL pour un examen de l’audition ;
– orienter vers un ophtalmologue ou un orthoptiste pour un examen de la vision ;
– prescrire à tout âge un bilan orthophonique de la communication et du langage oral ;
– prescrire un bilan du développement moteur chez un psychomotricien, un masseur-kinésithérapeute ou un ergothérapeute dans les cas où ont été observées des difficultés de fonctionnement dans les domaines de la motricité globale et/ou fine et des praxies ;
– proposer une orientation des jeunes enfants en établissement d’accueil du jeune enfant (crèche, etc.), régulier ou d’urgence, et si l’enfant est déjà en multi-accueil, demander une observation par les puéricultrices et/ou les éducatrices de jeunes enfants et une transmission de ces observations avec l’accord des parents ;
– et si nécessaire, débuter les prises en charge sans attendre les résultats des consultations de 2e ligne, dans un délai inférieur à 3 mois après le repérage des anomalies du développement.
Parallèlement, orienter sans attendre l’enfant vers une consultation de 2e ligne à visée diagnostique spécialisée dans les troubles du neurodéveloppement auprès d’un pédopsychiatre et/ou d’un pédiatre en lien avec une équipe de 2e ligne constituée de professionnels spécifiquement formés aux TND et au TSA (HAS, 2018).
Vous suspectez un trouble du spectre de l’autisme. 
Question 3 - Dans l’attente des résultats complémentaires, vous recherchez d’autres éléments en faveur du diagnostic de Léonie :
Complications : faible poids de naissance, mort fœtale in utero, rougeole congénitale ou post-natale.
La théorie vaccinale dans l’étiologie de l’autisme a été invalidée par de multiples études.
Le diagnostic de trouble du spectre de l’autisme a été confirmé chez Léonie. Elle a débuté un suivi psychomoteur de 2 séances par semaine dans un centre médico-psychologique (CMP) jusqu’à son entrée en maternelle. Le suivi au CMP a été interrompu à la suite du départ à la retraite de sa pédopsychiatre. Léonie a pu être accueillie en milieu scolaire ordinaire sans difficulté majeure.
Les antécédents familiaux retrouvent une valvulopathie au premier degré, une notion de déficience intellectuelle au second degré et la mère de Léonie s’est beaucoup reconnue dans les symptômes de l’autisme. Le bilan génétique ne retrouve pas de forme syndromique de l’autisme mais il semblerait exister une prédisposition familiale. Vous surveillez régulièrement le développement de son petit frère. 
Léonie est actuellement en CE1. Sa maîtresse se plaint de son comportement en classe : elle a des difficultés à rester assise, se lève régulièrement et dérange la classe. Elle répond sans attendre d’être interrogée et coupe la parole à ses camarades. Ce comportement ne favorise pas l’intégration avec ses pairs. D’après l’équipe enseignante, ces difficultés étaient déjà présentes l’année dernière mais elles se sont progressivement aggravées. Elle s’est battue pour la première fois avec un garçon qui s’était moquée d’elle la semaine dernière. 
En parallèle, elle a du mal à respecter les consignes et recopie mal le tableau en classe, ce qui la met en difficulté dans ses apprentissages et ses notes en pâtissent, sans qu’un redoublement ne soit pour l’instant envisagé.
Sur les conseils de la maîtresse, ses parents reviennent vous voir. Son père ne semble pas très inquiet car il vous dit avoir été pareil à son âge.
Question 4 - Concernant votre interrogatoire en consultation : 
L’ADI-R est réalisé dans la démarche diagnostique d’un trouble du spectre autistique.
Les difficultés scolaires et sociales de l’enfant peuvent induire un épisode dépressif caractérisé même à cet âge. Des difficultés d’attention, une agitation et des troubles du comportement (irritabilité, agressivité) peuvent être l’expression d’une symptomatologie anxiodépressive chez l’enfant. Il est aussi nécessaire d’éliminer ce diagnostic avant d’introduire un médicament psychostimulant.
L’ADOS est une observation semi-structurée de l’enfant de plusieurs heures réalisée dans la démarche diagnostique d’un trouble du spectre autistique. Elle ne se pratique pas non plus en cabinet de médecine générale.
Voici quelques exemples d’interprétations des symptômes décrits :
– avoir des difficultés à rester assise, se lever régulièrement et déranger la classe => impulsivité, hyperactivité, difficulté à intégrer les codes sociaux ou particularités sensorielles en lien avec l’autisme ;
– répondre sans attendre d’être interrogée et couper la parole à ses camarades => impulsivité, difficulté à intégrer les codes sociaux en lien avec l’autisme ;
– se battre régulièrement => hyperactivité avec impulsivité ;
– avoir du mal à respecter les consignes => difficultés à comprendre l’implicite en lien avec l’autisme, déficit attentionnel, difficulté dans la compréhension du langage écrit ;
– mal recopier le tableau en classe => difficultés ophtalmologiques ou orthoptiques, déficit attentionnel.
Un test de QI permettrait d’orienter vers un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ou des troubles des apprentissages.
Le TDAH est fréquent chez les personnes TSA (jusqu’à 40 %). 
Il est fréquent que les parents ou la fratrie soient aussi atteints de TDAH.
Les bilans de l’orthoptiste et de l’orthophoniste réfutent un trouble spécifique des apprentissages mais mettent en avant des faiblesses attentionnelles. Le questionnaire Conners rempli par la mère, le père et la maîtresse sont en faveur d’un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
Le test de quotient intellectuel (QI) retrouve :
– un indice de compréhension verbale (ICV) à 133 ;
– un indice de raisonnement perceptif (IRP) à 112 ;
– un indice de mémoire de travail (IMT) à 107 ; 
– un indice de vitesse de traitement (IVT) à 128. 
Le QI étant hétérogène, le QI total ne peut pas être calculé.
Vous annoncez le diagnostic d’un trouble de l’attention avec hyperactivité comorbide au trouble du spectre autistique avec un retentissement fonctionnel léger.
Question 5 - Concernant la prise en charge à proposer en première intention : 
Si un dossier MDPH avait déjà été réalisé pour l’autisme, il faudra renouveler la demande pour inclure le TDAH. Il est indispensable pour la mise en place d’aménagement scolaire comme le PPS.
Peut favoriser l’inclusion de l’enfant en milieu scolaire en proposant des interventions adaptées à son milieu de vie.
PPRE : mis en place par l’équipe éducative de l’école de Léonie.
PAI : nécessaire si prise de médicament à l’école, or aucun traitement n’est à prescrire en première intention dans le cadre d’un TDAH avec un retentissement léger.
Léonie n'a pas de déficience intellectuelle.
Des conseils simples ont été appliqués à l’école pour limiter la distractibilité de Léonie : elle est placée devant, proche du tableau, loin d’une fenêtre. Il ne lui est donné qu’une seule consigne à la fois, dans un environnement structuré et stimulant. Une accompagnante d’élève en situation de handicap (AESH) l’aide dans son travail scolaire.
Les parents ont suivi un groupe d’éducation thérapeutique avec Léonie et cette dernière a même pu bénéficier d’un programme de remédiation cognitive en groupe. 
Vous suivez Léonie et sa famille au cours des années, elle réussit à poursuivre ses études dans le milieu scolaire ordinaire. En sixième, elle est passionnée d’histoire et notamment de l’Antiquité, elle excelle dans cette matière et passe des heures à lire des livres ou regarder des documentaires sur ce sujet. Elle rencontre par ailleurs des difficultés de concentration dans les autres cours pour lesquels elle oublie régulièrement ses affaires, ses manuels, voire sa trousse. Par défaut d’organisation, elle oublie de faire ses devoirs.
L’intégration avec ses pairs est difficile, elle se sent isolée et a déjà entendu quelques moqueries à son sujet. Elle reste avec une fille de sa classe qui ne l’intéresse pas beaucoup. Elle s’est déjà disputée avec des garçons qui l’embêtaient, elle a pu verbaliser des menaces hétéro-agressives sans passage à l’acte et a été en retenue pour cela, ce qui lui a semblé injuste.
Au domicile, les parents décrivent des difficultés à l’endormissement connues depuis l’enfance qui se sont aggravées à l’entrée au collège, avec des réveils nocturnes en première partie de nuit.
L’interrogatoire ne retrouve pas de trouble obsessionnel compulsif (TOC). 
Vous ne retrouvez pas de facteur déclenchant retrouvé, ni de cause organique.
Question 6 - En consultation dans votre cabinet, vous prescrivez :
Troubles graves du comportement de l'enfant avec agitation et agressivité > 3 ans.
Pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) chez l’enfant hormis la schizophrénie > 15 ans.
Depuis le 13 septembre 2021, la prescription initiale des spécialités à base de méthylphénidate (Medikinet, Quasym, Ritaline, Ritaline Lp, Concerta et génériques) dans le TDAH est ouverte aux médecins neurologues, psychiatres ou pédiatres exerçant en ville mais pas aux médecins généralistes. De plus, il nécessite un bilan préthérapeutique (biologique, métabolique, cardiaque).
Léonie n'a pas de TOC.
Traitement recommandé pour les troubles du sommeil des enfants autistes.
La nouvelle pédopsychiatre de Léonie lui a prescrit du méthylphénidate à libération prolongée 10 mg matin après un bilan préthérapeutique et une consultation cardiologique. Ce traitement lui a permis une meilleure organisation tout en améliorant sa concentration en classe, facilitant ses apprentissages. 
En parallèle, le sommeil de Léonie s’est amélioré sous mélatonine avec une diminution de la latence à l’endormissement et une diminution des réveils nocturnes.
Question 7 - Concernant le suivi thérapeutique du méthylphénidate :
Le méthylphénidate a un effet anorexigène pouvant ralentir la croissance staturo-pondérale.
Le méthylphénidate augmente modérément la fréquence cardiaque et la tension artérielle.
Les palpitations sont un effet secondaire fréquent du méthylphénidate et nécessitent une surveillance des paramètres cardiovasculaires mensuelle mais elles ne sont en rien une contre-indication.
Le méthylphénidate peut majorer l’anxiété du patient et favorise une tristesse de l’humeur dans de rares cas.
C’est la surveillance du traitement par lithium qui impose un dosage régulier de la lithémie.
Le méthylphénidate peut favoriser des troubles du sommeil de par son effet excitateur et psychostimulant, il est donc nécessaire de le prendre à distance du coucher. Paradoxalement, il est possible qu’il diminue la tachypsychie de l’enfant ayant un TDAH et favorise ainsi l’endormissement (hors ECN).
L’asthénie diurne en lien avec les troubles du sommeil majore les troubles de la concentration en classe et il est primordiale de traiter les deux problématiques pour un résultat optimal.

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